mercredi 31 octobre 2018

70. Fichues statistiques

Ne croyez aucune statistique que vous n’avez pas manipulé vous-mêmes. Roger, mon premier professeurs de stats, prononçait souvent ces mots. Quelques années plus tard, quand j’ai enseigné occasionnellement les maths financières et donc aussi les statistiques aux banquiers, j’ai régulièrement répété ces sages paroles.

J’ai aimé ajouter des calculs de probabilités qui font partie intégrante des statistiques. Par exemple, si en termes de probabilités, vous avez une chance sur 165 millions de gagner le jackpot aux Euromillions, tout le monde y croit. Certains misent une fortune pour avoir 10 ou 100 chances sur 165’263’280... Si vous gagnez, vous vous en foutez qu’en fait, vous n’aviez aucune chance!

Le risque de mourir touché(e) par une météorite ou comète est cent fois plus grand que de gagner le pactole. Et pourtant, nous sommes tous sûrs que cela ne nous arrivera jamais. Mais si cela arrivait à l’un de vos proches, vous trouverez ceci injuste. Les statistiques vous auront menti.

De nos jours, dans les pays développés, il y a une probabilité de 1 sur 65 de naître avec un trouble du spectre autistique (TSA). Avec une moyenne de 1,5 enfants par famille, 1 famille sur 43 serait directement touchée par l'autisme. Sauf que souvent, là je parle de mes connaissances et pas de statistiques, une famille avec autiste aura plus de risques d’en avoir un deuxième. Cette corrélation supérieure à la moyenne fait descendre la probabilité chez les autres. Certes, tous les autistes ne sont pas autant dans le spectre que Nicolas. Certains ne seront diagnostiqués que très tardivement, voire jamais. Mais un TSA reste un TSA.

1 à 2 enfants sur 1000 seront atteints d’une arthrite juvénile idiopathique (AJI) avant leurs seize ans. Il s’agit là d’une maladie auto-immune qui inflamme puis détruit les articulations. La grande majorité des cas commence depuis les membres externes (genouds, coudes) et peut être ralenti ou même freiné par des médicaments. Rarement, cela se déclenche par l’intérieur comme la colonne vertébrale, et se répand depuis là sur les autres membres. Je n’ai pas trouvé de probabilité fiable, je l’estime donc à 1 sur 5000 voire 1 sur 10’000.

En plus d’être autiste, Nicolas vient d’être diagnostiqué d’une arthrite juvénile idiopathique venant de la colonne vertébrale. Comme il ne semble pas avoir de corrélation entre le TSA et l'AJI, la probabilité d'avoir un enfant AJI-TSA est entre 1 sur 325'000 et 1 sur 650'000. Je savais que mon Nicolas tellement aimé était très spécial, mais à tel point...!!!


La spécialiste propose de commencer rapidement à lui injecter des médicaments biologiques, complété par des médicaments de chimiothérapie toutes les semaines. Il faudrait lui ajouter d'autres médicaments pour atténuer les effets secondaires de ces traitements lourds.

Nous avons demandé un deuxième avis à un autre médecin. Nous n'avons pas de doutes sur les symptomes mais espérons pouvoir lui donner une autre forme de traitement. Quand je pense que pour un autiste, couper les ongles ou les cheveux est déjà extrêmement lourd à supporter... mais comment allons-nous faire des injections toutes les semaines???

Vu la rareté du cas, il est difficile de trouver des groupes de discussion à ce sujet. Heureusement que j'ai épousé une femme merveilleuse qui s'informe sur et se forme en autisme afin de lier ses connaissances avec les traitements à venir.


Selon les statistiques, 40% des enfants seront en rémission au bout de 8 à 10 ans de traitement. Oui, vous avez bien lu 8 à 10 ans, pas 8 à 10 semaines ou mois...

Mais notre cher Nicolas sera le cas sur un million qui sera guéri au bout d'une année de traitement déjà! Nous ferons tout ce qu'il faudra pour qu'il brise toutes les statistiques!!!

samedi 20 octobre 2018

69. Notre système de santé

C’est la saison où ils annoncent les hausses de primes des caisses-maladies. Comme chaque année, toute la population suisse est scandalisée de la politique incapable de freiner les coûts de la santé, des médecins qui gagnent trop et du citoyen moyen qui n’arrive bientôt plus à payer ses cotisations. La honte, quoi!

Chez nous, cette année, ce ne sera « que » deux pour cent d’augmentation. Depuis notre retour en Suisse en 2006, nos coûts de santé ont plus que doublé. Mais nous les payons volontiers parce que nous recevons quelque chose en retour. 

Lorsque nous habitions en Angleterre, le système a prélevé plus du tiers de notre salaire pour financer un système de santé où il fallait attendre douze heure aux urgences pour obtenir un Dafalgan, cinq semaines pour aller chez le dentiste lorsqu'une dent s'est fracturée, ou dix mois pour obtenir de la physiothérapie contre des maux de dos dûs a la grossesse... sans blague!

Depuis trois semaines, nous avons de gros soucis de santé avec Nicolas. Il a commencé par se plaindre de douleurs aux jambes avant de ne plus tenir debout par moments. Visite médicale, prise de sang, ultrasons en moins d'une semaine! Depuis notre passage aux urgences samedi passé, ils nous ont envoyé chez une spécialiste lundi déjà, nous avons eu droit à des radiographies et une IRM. Sous anesthésie générale parce qu’un autiste n’arriverait pas à tenir tranquille dans le tube. Winny, le chien guide, à même pu venir avec en salle! 

Nicolas a reçu une chaise roulante le lendemain où les jambes l’ont lâché. Et des médicaments contre les douleurs, et d’autres anti-inflammatoires. 

Ce matin, sept jours après l'entrée aux urgences, nous avons eu droit aux résultats. Ils ont exclu une tumeur et une leucémie, ils disent que c'est une arthrite juvénile.

Oui, nous avons eu peur! En sept jours, j’ai pris cinq ans et perdu trois kilos. Une arthrite juvénile n’a rien d’anodin, mais ce n’est pas mortel.

Résultat des courses: Nous payons une fortune tous les mois pour pouvoir compter sur des médecins compétents en Suisse. Et entre nous: je payerai même plus s’ils obligeraient les toubibs à suivre des cours de psychologie, histoire de ne pas vous confronter avec des diagnostics fatals possibles avant d’avoir des résultats...

Et je payerai volontiers encore plus s’ils n’attendaient pas le lendemain des analyses pour vous annoncer les bonnes nouvelles...

lundi 1 octobre 2018

68. La Marie

C’est l’automne, et j’adore! Il y a plein de feuilles sèches par terre qui font du bruit quand je marche. Scroutch scroutch scroutch! Lors des sorties avec maman et/ou papa et Winny, on va souvent à la Marie. Winny peut courir parce qu’il n’y a pas de voitures, et moi je peux faire des bricolages.

Maman m’a expliqué qui était Marie. C’etait une gentille dame, mais je n’ai pas compris pourquoi ils l’ont mise derrière les barreaux...



En plus des feuilles, il y a des bouts de bois par terre, des cailloux, des écorces d’arbres. J’ai découvert mon talent artistique ici. Vous avez bien lu: artiste, pas autiste!

Après avoir construit des petits bateaux, je me suis mis au Land-art. Je bricole des personnages et des animaux. Je mets plus d’énergie à mettre en place les détails plutôt que la figure elle-même. D'abord le visage, puis les boutons pour fermer la veste... quatre boutons, sinon le froid va entrer. Puis la ceinture, les chaussettes... et le nez!

Chaque caillou et chaque bout de bois est soigneusement sélectionné. Voici le cochon et le loup. C’est un gentil loup, le petit cochon n’a pas peur.






Après avoir terminé ces heuvres d'art, je lance deux-trois fois un gros bâton vers Winny avant de reprendre le travail sur mes sculptures.

Papa, lui, est super content. Il dit que j’arrive à m’éloigner du concret et à faire fonctionner mon imagination. De plus, je m’occupe tout seul. Il a le temps d'écrire un blog sur son portable pendant que Winny ronge un bâton. Cela me donnera du matériel pour les prochaines figurines!