mardi 24 décembre 2019

102. Une histoire de Noël

Il était une fois un petit garçon qui venait de fêter ses sept ans. Même si ceci est une histoire de Noël, ce n'était pas le divine enfant. 

C’était un enfant différent. Il vivait dans son monde à lui, il réagissait à sa façon à lui, il avait sa logique que lui seulement comprenait. Quand quelqu'un essayait de pénétrer dans son monde, le petit garçon s'enfermait complètement et ne réagissait à plus rien.

En fait, il était heureux dans ce monde, même s'il était bien seul dans son monde à lui.

Ses parents ont essayé de l’aider à sortir de son spectre. Ils ont réalisé que même si le petit garçon avait voulu les rejoindre, il n’y arrivait pas parce qu’il était trop différent. "C'est trop difficile pour moi!" Il aurait fallu changer la façon d’être, la façon de penser, la façon de communiquer dans ce monde qui n’était pas le sien. Il aurait fallu s’adapter en permanence, se sur-adapter, ce qui provoqua une grande fatigue.

Maman et papa insistaient, ils le motivaient, ils le stimulaient. Mais comme le petit garçon fréquentait aussi d’autres lieux que son domicile et d’autres personnes que ses parents, le petit garçon était déstabilisé par les différences parmi les personnes qui, pour lui, étaient différentes.

Puis, ces personnes ont commencé à se coordonner encore plus dans le but d’uniformiser leurs moyens, leurs règles, leurs discours. Ils se sont faits des messages vocaux, des e-mails, des réunions et des SMS. Ils se sont vus, ils se sont appelés encore plus souvent, même le soir et le dimanche, afin d’accorder leurs violons. Ils n’ont pas compté leurs heures, leur engagement était total!

Du coup, le petit garçon a commencé à s’intéresser un peu plus à leur monde. Il a découvert beaucoup de nouvelles choses et s’intéressait à ce qui se passait dans le monde parallèle. Grâce au dévouement des grands, le petit voulait progresser plus et plus. C'est toujours difficile pour lui, mais le petit garçon veut se donner les moyens pour y parvenir.

Le résultat est que grâce aux progrés réalisés, le petit garçon pourra aller à l'école "normale" un deuxième jour chaque semaine, et ce dès janvier déjà. Il s'intéressera encore plus à "notre" monde, et de ce fait il progressera encore plus.

Je vous ai parlé d’histoire de Noël, la voilà! C’est un cadeau de Noël, ces gens qui se donnent sans limite pour le bien de ce garçon, qui ne comptent pas leurs heures et leurs efforts, et grâce à qui le petit garçon pourra un jour mener une vie un peu plus normale - même s'il restera toujours différent.

Merci donc à C, C, S et A (elles se reconnaîtront), vous êtes notre plus beau cadeau! Merci aussi aux autres qui entourent Nicolas et qui l'aident pour tout ce que vous faites au quotidien pour le bien de notre petit garçon.

Bonnes fêtes à vous qui suivez Nicolas de près ou de loin. J'espère que vous aurez aussi des si beaux cadeaux :-)

Joyeux Noël!


samedi 14 décembre 2019

101. Comment pense un autiste?

Vous avez cliqué sur le lien parce que le titre de cette publication vous interpelle? Vous allez enfin avoir un peu de lumière dans cette Blackbox qu’est un cerveau d’autiste?


Je dois vous décevoir. Je ne sais pas ce qui se passe dans un cerveau (ni autiste ni neurotypique d'ailleurs). Je ne sais pas comment pense un autiste, ni pourquoi.


Après cent blogs tirés généralement de notre quotidien avec Nicolas, je vais commencer de citer de temps en temps des exemples très "autistes". Ceux-ci sont tirés de conférences ou d’ouvrages écrits sur ce sujet, puis comparées à notre quotidien avec Nicolas.

Voici un premier exemple, vu récemment dans une conférence de Josef Schovanec, probablement l’autiste le plus connu en Europe:

Que pensez-vous de l’histoire suivante?




1. Le bébé s’apprête à dire ses premiers mots.
2. Les parents sont heureux et impatients.
3. Le bébé récite une formule mathématique.
4. Les parents jettent (ou posent) leur bébé dans une poubelle.


Cela vous choque? Alors vous n’êtes probablement pas autiste. Sauf si...


Sauf si vous êtes perturbés par la formule mathématique qui n’est pas juste! Pourquoi garder un enfant s’il ne sait même pas appliquer une formule de maths? Si c'est le cas, vous découvrez des traits autistiques chez vous. Vous vous arrêtez à la case erronée, vous n’allez pas plus loin.

Transposition de cette BD dans le quotidien avec Nicolas:
1. Nicolas adore les spaghettis, et il sait qu’il en mangera ce soir. Il a aussi vu sur son planning journalier qu’on aura une invitée ce soir. Quand c’est l’heure du souper, Nicolas n’arrive pas à rester à table parce que la disposition de table est différente, peut-être parce qu’il y a une personne en plus. Même s’il adore le repas et qu’il a faim, il n’arrive pas à manger. Il y a quelque chose qui le dérange et il n’ira pas plus loin tant qu’il y a ce changement de l’habitude.

2. Nicolas veut aller à la place de jeu, comme tous les jours. La veille, il a fait beau et chaud, il a pu y aller en t-shirt. Aujourd’hui, il fait plus froid et il pleut. La pluie ne dérange pas Nicolas, mais il ne veut pas mettre sa veste parce qu’hier, il est sorti sans veste. Cela le dérange tellement que pour finir, il ne veut plus aller à la place de jeu. Il se cache dans sa chambre en ronchonnant pendant des longs moments. La journée est gâchée, pas à cause de la pluie mais de la veste de pluie!

3. Nicolas adore aller à la „vraie“ école le vendredi pour apprendre à lire et à écrire comme les autres enfants. Maman fait les quatre trajets pour amener et chercher Nicolas, en compagnie de Winny, notre chien guide. Vendredi passé, il y a eu une urgence médicale, maman a dû se rendre à l’hôpital avec le frère à Nicolas. Papa est rentré du travail à midi pour amener Nicolas à l’école à 13h30. Comme papa n‘est pas formé au chien guide, il décide de s’y rendre en voiture. Nicolas crise, hurle, pleure... il ne veut pas aller à l’école en voiture. Il y ira quand même, de force, mais cela sera un après-midi compliqué à l’école.

Trois exemples qui montrent la rigidité de la pensée de notre petit autiste. Si le cheminement n’est pas le même pour arriver à un résultat qu’il aime (spaghettis, place de jeu, école...), rien ne va plus. Il sacrifie le résultat à cause de changement de sa routine.

Ce sont hélas toutes les situations du quotidien qui risquent de compromettre la suite de la journée. Même si nous avons beaucoup appris au fil des années et que nous essayons de préparer Nicolas à tout, le moindre imprévu peut changer la donne: une ambulance qui fait du bruit, une prof qui est malade, le facteur qui sonne à la porte...

Vous soupçonnez votre voisin d’être autiste non diagnostiqué (ou non communiqué)? Soumettez-lui la BD ci-dessus :-)

vendredi 29 novembre 2019

100. Dormir

Le corps humain a besoin de manger, de boire et de se reposer.

Il paraît qu'à Guantanamo, les gardiens de prison ont privé les prisonniers de sommeil, ce que ces derniers ont trouvé pire que le fait de ne pas pouvoir s'alimenter comme il faut.

Les personnes avec un TSA (trouble du spectre autistique) ont régulièrement des troubles du sommeil. Leur corps ne produit pas ou pas assez de mélatonine (l’hormone du sommeil). Nous avons posé la question à plusieurs spécialistes, mais personne ne semble connaître les raisons. C'est ainsi et pas autrement.



Lorsqu’il était bébé, bien avant qu’on ait obtenu un diagnostic, Nicolas dormait cinq à six heures. Non, pas cinq heures par nuit, cinq heures sur la journée. Style de 1h00 à 3h00, de 8h30 à 10h00 puis de 17h00 à 18h30! Tous les jours, les horaires changeaient, il n’avait aucun rythme. Quand il n’en pouvait plus, Nicolas s’endormait. Au bout de deux-trois heures, la machine s’était reposée pour tourner à fond pendant cinq ou sept heures.


C’était une période affreuse! Nous étions en souci pour notre enfant qui ne dormait pas. C'était difficile de planifier quoique ce soit, même un repas ou une promenade. Et nous étions crevé par un rythme intenable.

De plus, nous avions une famille à gérer. Les deux frères à Nicolas avaient moins de dix ans et besoin qu'on s'occupe d'eux. Il fallait aussi assurer un salaire tous les mois. Je ne pouvais pas appeler mon chef le matin pour dire que je ne viendrai pas travailler parce que je n'ai pas fermé l'oeil de la nuit.

Avec mon épouse, nous nous sommes relayés pour garder Nicolas et ses frères. C'était du 24/24, 7/7. J'ai essayé d'assurer la première moitié de la nuit et les week-ends. J'ai dormi la deuxième moitié de la nuit et durant le voyage en train pour aller au travail. Le week-end, il fallait remplir les accus pour tenir la semaine. Il nous est arrivé de dormir une heure par terre en pleine journée, à côté de Nicolas, lorsque celui-ci s'était endormi.

Les médecins disaient qu'ils ne pouvaient rien faire. Des rigolos ont dit qu'il fallait donner de l'abricotine à Nicolas pour qu'il dorme. D'autres gens ont suggéré qu'il fallait le laisser crier jusqu'à ce qu'il s'endorme. Nous l'avons laissé crier, mais il ne s'endormait pas. Nous avons suivi d'autres conseils et donné des thés, infusions, crèmes, gouttes homéopathiques etc. à Nicolas. Ca n'a servi à rien.

Je ne sais pas comment nous avons fait pour tenir. Mais nous avons tenu! Nous avons résisté physiquement à ces années pénibles, et le couple s'est même renforcé parce que nous n'avons pu compter que sur l'autre.

Lors de notre première visite chez la pédopsychiatre de Lausanne, celle-ci nous a prescrit de la mélatonine. Oui, elle nous a permis d'accéder à cette hormone du sommeil, produite artificiellement, qui existe en libre accès dans de nombreux autres pays. Et elle nous a félicité d'avoir tenu toutes ces années, elle a même dit que ce n'était pas humain ce que nous venons de vivre pendant des années. Cela a fait du bien!

Pourquoi l'autre pédopsychiatre (le premier, celui qui a mis plus d'une année à poser un diagnostic) ne nous a jamais prescrit de la mélatonine? Pourquoi les médecins ne nous ont jamais parlé de ça?
"Parce qu'on ne donne pas des médicaments pour dormir à un bébé. Il doit apprendre à s'adapter."
Aujourd'hui, je dirais que primo, ce n'est pas un médicament (c'est une hormone) et que secondo, un autiste n'arrive pas à s'adapter à cet âge-là.

Depuis trois ans environ, Nicolas dort en général de 20h00 à 6h00 environ. Comme un enfant de sept ans. 
Une nuit par mois, il s’agite et se lève vers deux heures du matin pour jouer, sans se recoucher avant d’aller à l’école. On dirait qu’il doit de temps en temps revivre sa période antérieure. Non, nous n’arrivons pas à prédire quand cela arrive, rien ne nous y prépare.

L’autre jour, un collègue était choqué parce que nous mettons notre fils de sept ans sous médication pour dormir.

En bon Suisse, je lui ai répondu:  C’est pour lui. Dormir, c’est bon pour la santé! 

Et c’est vrai: Depuis que Nicolas dort mieux, je dors mieux (même le soir devant la télé), je me sens mieux!


PS: Si vous connaissez quelqu’un qui vit quelque chose de similaire, dites leur d’insister pour obtenir une ordonnance pour de la mélatonine.
Si le médecin refuse, qu’ils traversent la frontière pour acheter ceci en libre-accès en France par exemple. Il faut 0,1 mg par kilo de l’enfant, 30 minutes avant le coucher (un enfant de 10 kg prendra donc 1 milligramme), sous forme liquide ou mélangé dans un yogourt.



jeudi 14 novembre 2019

99. Okay?

Si vous avez plus de 40 ans, vous connaissez certainement ce film et vous rappelez peut-être de cette scène surréaliste (et bête). Tellement stupide pour qu'elle reste incrustée dans ma mémoire.




Dans l'adaptation française du film "Airplane!" (Y a-t-il un pilote dans l'avion?), le commandant de bord Havoux et pilote Roger sont prêts pour le décollage de leur avion pour Chicago. Le navigateur Victor se trouve à l'arrière-plan à la radio. S'en suit la communication radio avec la tour de contrôle. 

Comme la communication radio est une communication unilatérale, la personne qui reçoit confirme la réception du message par "Rodgeur". Quand on a fini de parler on libère le réseau avec un "à vous". Ajoutez Victor qui calcule le vecteur et une portion de bêtise humaine pour arriver à cette scène...

Quand on parle à un enfant autiste, il y a aussi des communications unilatérales. Je parle à Nicolas mais je ne sais pas s'il m'a entendu ou s'il a réalisé que je lui ai parlé. Cela peut être frustrant de parler dans le vide, surtout si on ne s'en aperçoit pas.

A l'institut, les professionnels qui ont beaucoup plus d'expérience que moi et qui sont formés pour travailler avec des autistes semblent avoir introduit un langage similaire. Au lieu d'arrêter la phrase avec "à vous" et reprendre avec "Rodgeur", ils demandent "okay?" et confirment par "okay!" L'intonation n'est pas la même. 

Les éducateur ne m'ont pas dit qu'ils procèdent ainsi. Nicolas est un livre ouvert et reprend ces habitudes à la maison.

Nicolas joue avec ses figurines:
- "Sophie, tu vas prendre un bain, OK?" "OK!"
- "Henry, tu fais de la lecture, OK?" "OK!"
- "Marcus, tu prends le train. OK?" "OK!"
- "Peppa, tu manges le jambon, OK?" "OK!"
   (l'histoire avec Peppa et le jambon, ça vient de lui...)

Idem avec nous:
- "Maman, je veux manger des spaghettis. OK?" 
  "Non, aujourd'hui on mange un risotto."
  "OK, je mange du risotto."
- "Papa, tu vas te mettre en training. OK?"
  "D'accord, je me mets en training."
  "OK."

Quand on écoute ces communications, on doit passer pour des débiles. Je m'en fiche. C'est une façon de communiquer où on peut vérifier si l'autre a compris ce que l'on vient de dire. 

- "Nicolas, c'est l'heure d'aller au lit."   Pas de réponse...
  "C'est l'heure d'aller dormir!"   Pas de réponse...
  "Il faut aller au lit. OK?"   Ce dernier mot déclenche la réaction.
  "Non, je veux encore jouer! Je ne suis pas fatigué!"
  "Encore deux minutes. OK?"
  "OK." Quelques minutes plus tard, Nicolas va se coucher.

Dans le monde actuel, on devrait des fois instaurer les mêmes règles pour être sûr que le message arrive... ou comme quoi nous avons bien reçu le message.

Okay?

vendredi 8 novembre 2019

98. Cadeau et gâteau, quel fardeau!


En septembre, les grandes surfaces rangent les affaires d'été pour sortir les décorations de Noël, et le facteur amène les catalogues de jouets à tous les ménages. 2019, c'est la première année où Nicolas a attentivement scruté ces cahiers remplis de photos de jouets, et à notre demande il a même encerclé ceux qu'il voudrait recevoir. Si d'autres enfants entourent 200 jouets, Nicolas en a choisi deux!

Mon épouse a donc acheté deux cadeaux avant que le stock soit en rupture et caché le tout dans la cachette secrète que seul le Père Noël et nous connaissons.

En novembre, c'est la période des anniversaires chez nous! Rien que dans notre petite famille, nous fêtons trois anniversaires en huit jours! Nicolas vient d'avoir sept ans. Quel grand garçon!

Si vous suivez ce blog depuis assez longtemps, vous savez que Nicolas est "allergique" aux gâteaux d'anniversaire et aux chants d'anniversaire ou de Noël. Jusqu'à l'année passée, il ne supportait même pas les cadeaux. Aujourd'hui encore, il doit savoir ce qu'il y a dans le paquet avant d'être capable d'ouvrir un cadeau.

Nous avons donc invité une amie de la famille dimanche pour fêter les trois anniversaires en une seule fois. Ce n'était pas forcément pour Nicolas, il n'y avait pas excessivement de personnes à table. Mais c'était spécial d'avoir une invitée.

Et là, je m'aperçois que Nicolas grandit. Il sait que c'est (presque) son anniversaire, il sait qu'il aura droit à un cadeau, il choisit donc celui qu'il a marqué dans le catalogue qui en fait est destiné au Père Noël. Il a réalisé que le petit carton déposé par une voisine ne pouvait pas contenir la maison de Peppa Pig, il n'a même pas voulu l'ouvrir. Ni les cartes, ni rien. Avant le dessert, nous avons donc dû discrètement vider la cachette du Père Noël (qu'il faudra de nouveau remplir avant le 24 décembre) pour que Nicolas soit content.

Pour maintenir les traditions (et peut-être pour sortir notre fils un peu de sa zone de confort), nous avons servi le dessert qui n'avait pas de bougies posées dessus. Ce n'était pas un gâteau d'anniversaire. Néanmoins, notre invitée a spontanément entamé la chanson "Joyeux anniversaire" durant trois secondes... 

Effectivement, Nicolas est sorti de sa zone de confort, il est parti en crise... et en cris dans sa chambre! Il y est resté plus d'une heure, même si son cadeau l'attendait. Nicolas n'était simplement pas capable de retourner dans le salon. Ce qui dérange (la chanson, le gâteau) était bien plus fort que ce qui l'attire (le cadeau).

C'est à ce moment que je réalise une fois de plus: Même s'il grandit et qu'il fait des grands progrès, Nicolas reste autiste. Il le restera toute sa vie. Le moindre imprévu, une routine qui change, quelque chose qui sort de l'ordinaire, c'est et cela restera très difficile à gérer.

Bon anniversaire, mon grand garçon! Heureusement que tu n'as qu'une fois par année ton anniversaire...

jeudi 31 octobre 2019

97. Râleur!

Je suis un râleur. Je ne fais que me plaindre dans mes blogs, et il n’y a que du négatif dans mes récentes activités sur les réseaux sociaux, comme ce courrier des lecteurs. Ce n’est pas en se plaignant que les choses iront mieux. Il faudrait que je sois content avec ce que nous avons en Suisse, c’est quand même mieux que ce que d’autres pays proposent.

Je suis donc un râleur. Ceci a été dit par une personne qui n’a pas d’enfant autiste. J’en prends note. Elle a certainement raison. Personne ne pourra me reprocher d’être méchant, menteur ou malicieux, ni radin ni égoïste ni égocentrique. Je ne bats pas ma femme, je ne la trompe pas non plus, je passe du temps avec mes enfants. Je suis ni un pervers-narcissique ni une brute. Mais je suis un râleur.

Je râle, donc je suis ? Pas du tout ! Avant de râler, je m’assure que mes enfants vont bien.

Si je râle, c’est pour la bonne cause, ou plutôt pour la cause de l’autisme. Je pense que la qualité de vie à Nicolas a pu s’améliorer ces dernières années parce que ma femme et moi râlons. Si Nicolas a été le premier enfant de l’institut à pouvoir suivre une intégration partielle dans la scolarité « normale », c’est parce que nous avons râlé. Et si cette intégration se passe bien, c’est parce nous ne laissons plus rien passer, qu’on intervient dès que cela s’avère nécessaire.

Tous les deux, on assume si nous passons pour des parents pénibles. En attendant, plusieurs professionnels nous ont confirmé que ceci est bien, qu’ils ont plaisir s’il y a des parents qui s’impliquent. A croire qu’il y a d’autres papas et mamans qui pourraient faire plus pour se faire entendre.

Si je râle, c’est que j’en ai juste marre que les autorités et les administrations nous promettent régulièrement des choses, mais que rien ne bouge. Le Conseil fédéral a décidé en octobre 2018 que les personnes autistes doivent pouvoir fréquenter l’école et apprendre un métier. A Fribourg, ils l’ont confirmé, il y a zéro franc de budget pour la cause de l’autisme jusqu’en 2023. Comment améliorer la prise en charge, l’intégration, sans avoir le moindre sou à disposition ?

Si avant ma naissance quelqu’un m’a donné une mission à accomplir sur cette terre, ça a été de faire changer quelque chose pour la cause de l’autisme en Suisse Romande, à commencer par Fribourg. Je continuerai à écrire des tribunes libres, d’autres lettres au Conseil d’Etat suivront. Un jour, il y aura un résultat.

Mes messages n’ont pas l’envergure de ceux d’une Greta Thunberg. Mais d'après les échos que je reçois, je sais que tout ce que je dis ne se perd pas dans les immenses couloirs de l’administration.

Je continuerai donc de râler pour la bonne cause tant que j’aurai l’énergie.

Et vous, c’est quoi votre défaut ?




vendredi 18 octobre 2019

96. L'empire du papier plastifié

Quand le soleil se couche et les petits enfants dorment, ils entrent en action: Fanfan l’imprimatrice et Matt le laminateur regroupent leurs forces pour le bien de leur peuple.

L’imprimatrice recherche des images dans sa photothèque et sur Google, les assemble, crée des tableaux et des suites plus ou moins logiques. Elle imprime le tout sur son imprimante. C'est à ce moment que le laminateur entre en jeu : Il découpe le tout dans le bon format, l’emballe dans des pochettes et passe plastic par plastic dans la lamineuse.

Le résultat? Des beaux pictogrammes, des déroulements, des scénarios sociaux ou des petits classeurs qui permettent au peuple - Nicolas - de feuilleter, regarder, anticiper et se réjouir de ce qui l’attend... et surtout à éviter des crises dues aux imprévus.


Il y en a pour tous les goûts : Des petits, des grands, en couleur ou en noir et blanc. Les seules limites sont les gros doigts du laminateur qui ne permettent pas d'aller trop dans le détail, ainsi que la taille de l'imprimante. L'imprimatrice, elle, ne connaît pas de limites!

Au début, après avoir reçu une douzaine de pictogrammes du jardin éducatif spécialisé, ils ont hésité à investir dans du matériel. Est-ce que le "peuple" a vraiment besoin de ces supports visuels? Ou est-ce l’argent jeté par les fenêtres?

Les réponses étaient vite trouvées: 
- Oui, le "peuple" en a besoin. Cela lui permet de se préparer à son quotidien, moment après moment, jour après jour, mois après mois.
- Non, ce n'est pas du gaspillage d'argent. Mais n'en parlez surtout pas à Greta et sa clique, ils feraient une crise cardiaque en voyant la masse de papier et de plastic utilisé pour le "bien du peuple"...

Actuellement, les pictogrammes et photos remplissent 3 boîtes afin d'être prêt à (presque) toutes les situations. Sans parler des pictos laissés délibérément au "peuple" pour s'amuser.

Le parc matériel aussi s’est agrandi et professionnalisé. L’imprimante à jet d’encre a fait place à une laser couleur. Les pochettes en plastic sont disponibles dans de nombreux formats. Les ciseaux ont été remplacés par des coupe-papiers avec une grosse lame qui fait presque peur. Dernière acquisition, des perforatrices pour arrondir les angles... cela existe pour de vrai!

Donc, quand le soleil se couche et le "peuple" dort, les parents normaux allument la télé. L'imprimatrice et le laminateur, eux, se rappellent qu'il faut encore plastifier la photo de la nouvelle stagiaire à l'école demain, changer le planning mensuel parce qu'un rendez-vous médical s'est greffé dessus le 15 et aussi imprimer une photo de la nouvelle aire de jeux au centre commercial. 

Quand le soleil se lève et les petits enfants se réveillent, l'imprimatrice et le laminateur viennent de se coucher...

vendredi 4 octobre 2019

95. Souffrances?

Dans beaucoup de livres qui traitent le sujet de l’autisme, les auteurs ne parlent pas d’ « autistes » quand ils décrivent les personnes. Souvent, ils parlent de « personnes avec autisme » ou de « personnes souffrant d’autisme ». C’est certainement une forme plus polie d’écrire que la mienne, de plus ce sont des professionnels qui rédigent ces livres, ils sont bien plus instruits que moi!


Même en ayant lu ceci un millier de fois, je me pose à chaque fois la question en lisant ces passages: Est-ce une mauvaise traduction? Est-ce que la personne avec autisme en souffre vraiment?

Nicolas est un enfant de sept ans extrêmement souriant. Quand il joue, et cela arrive très souvent, il est heureux! Je n’ai pas le souvenir d’avoir vu d’autres enfants dans sa tranche d’âge qui manifestent le même plaisir en jouant. Il est dans son monde - dans son spectre - et il y est heureux tant que rien et personne ne le dérange.

Certes, il y a des moments difficiles, par exemple quand quelque chose ne se passe pas comme Nicolas le pense. Une figurine qui ne tient pas debout, une étiquette du nouveau t-shirt qui chatouille sa nuque, une visite inattendue qui sonne à la porte... ce sont des énormes frustrations et des moments difficiles! Mais est-ce que d'autres enfants de sept ans n'ont pas aussi leurs moments de frustration?

Afin de réduire ces situations compliquées, nous essayons de planifier au mieux chaque journée, de couper les étiquettes... je dirai même qu’on fait attention en achetant un nouveau jouet qu’il soit stable quand on le pose par terre.

Ces préparatifs et cette rigueur permettent probablement à Nicolas de moins souffrir de son autisme.

D’accord, il est petit et il ne connaît rien d’autre que son état. Je présume donc qu'il n'en souffre pas parce qu’il ne connaît rien d’autre. Jusqu’à présent, ce sont surtout les parents qui souffrent... Pourtant, les auteurs des livres ne parlent jamais de « papa ou maman souffrant d’un enfant autiste ».

Après avoir discuté avec des adultes avec le syndrome Asperger et lu quelques livres, j’émets ma théorie sur le sujet - sans aucune prétention d’être scientifique ni exhaustive ni complément juste: 

Il y a trois types de personnes avec autisme :
- ceux qui n’en souffrent pas (encore),
- ceux qui effectivement en souffrent, et
- ceux qui n’en souffrent plus.

Explication : Durant son parcours de vie, l’autiste se rend compte de sa différence. Il s'agit là d'une « deuxième adolescence » qui a souvent lieu entre 25 et 35 ans, peut-être plus tard... peut-être pas du tout. 

La personne avec autisme se transforme d'un jeune qui est différent (qui peut en souffrir) pour devenir un adulte qui est différent. Après cette période de transition, la personne accepte la situation et peut construire quelque chose en se focalisant sur ses forces. Il arrive régulièrement qu’ils sont fiers d’être ceux qu’ils sont. Ils ont appris à s’organiser pour rendre leur quotidien plus viable, ils ont élaboré leurs stratégies pour faire face aux imprévus. Ce sont des êtres humains bien plus forts que les 99% des neurotypiques.

Je pense que cette « adolescence de l’autisme » aura lieu de plus en plus souvent. De nos jours, les universités forment de plus en plus de professionnels de l’autisme qui pourront les accompagner dans cette transition. Les parents ont des possibilités de formation qui n’existaient pas encore dix ou quinze ans en arrière, internet offre énormément de possibilités de se documenter et de communiquer, ce que la précédente génération n’a pas encore pu faire. Les nouveaux parents pourront coacher leurs enfants avec autisme.

Vous aussi, rien qu’en lisant mon blog de temps en temps, vous vous rappellerez de l’une ou l’autre astuce qui vous rendra service la prochaine fois que vous aurez une personne avec autisme en face de vous. Et si vous pensez que cela ne vous arrivera pas, détrompez-vous! Une personne sur cent a des troubles autistiques... même si elle n’en souffre pas!



vendredi 20 septembre 2019

94. Interview avec un professionnel



Blog: Bonjour Monsieur...
Professionnel: Je n’ai pas l’habitude des formalités. Appelez-moi Pierre.

Bonjour Pierre. Que faites-vous dans la vie?
J'ai un métier formidable. Je m'occupe d'un garçon qui a des troubles du spectre autistique. Je l'accompagne dans son quotidien.


Vous le soignez?
Non, l'autisme ne se soigne pas. Je me rends avec lui à l'école ou en thérapie, à la place de jeu ou au magasin. Comme il me connaît bien, ma présence le rassure et le calme.


J'imagine que vous ne faites pas du 8-17 heures?
Non, loin de là! Ce job demande de la présence en quasi-permanence. Même si le travail intensif ne remplit qu'une petite partie de la journée, il faut être prêt au travail très rapidement. Dès que le garçon se met en crise, je dois aller vers lui pour le calmer.

Vous devez donc habiter pas trop loin de la famille pour être disponible rapidement?
J'habite chez la famille. Ils me mettent à disposition une pièce dans leur appartement.

Vous gagnez bien votre vie?
L'argent n'est pas important pour moi. Je suis nourri-logé, j'ai des amis, le travail me plaît... j'ai tout ce qu'il me faut! De plus, je passe beaucoup de temps avec la maman du petit. Je l'adore, je crois même que j'en suis un peu amoureux... mais gardez ceci pour vous!

Comment avez-vous choisi ce métier?
On peut dire que c'est une histoire de famille. Mes grands-parents étaient très sociables, mes parents aussi. Cela s'est transmis à mes frères et soeurs, et à moi aussi. Nous avons tous choisi un métier dans le social, dans les homes ou avec des personnes malvoyantes.

Quelles qualités faut-il avoir dans votre métier?
Tout d'abord, il faut vouloir le faire. Donc beaucoup de volonté et de disponibilité. Et il faut de la rigueur et une bonne condition physique. Une bonne vue et aucun trouble de l'ouïe complètent le profil.

Vous avez dû suivre une formation?
Oui, j'ai suivi une formation à Bâle qui dure environ 8 mois. A la fin, j'ai dû passer un examen. Maintenant, je tiens mon certificat fédéral en poche.

Vous êtes donc accompagnateur pour autiste?
Notre métier est apparu assez récemment en Suisse, et nous ne sommes qu'une petite cinquantaine à l'exercer dans ce pays, dont trois ou quatre en Suisse romande. Et pourtant, il y aurait la demande...

Si la demande existe et si c'est un beau métier, pourquoi n'y a-t-il pas plus de personnes qui se forment?
Le problème est qu'il n'y a pas assez de places de formation. Seul 5-6 personnes peuvent se former à la fois. Ils veulent doubler les capacités mais le projet tarde à se concrétiser. Les raisons sont connues, j'espère que cela se règle bientôt.

Avez-vous quelque chose à rajouter?
Oui... en fait, je ne m'appelle pas Pierre. Je m'appelle Winny, je suis un chien d'accompagnement pour autistes. Relisez donc cette interview encore une fois, en connaissance de cause.

jeudi 12 septembre 2019

93. Replay

Si vous ratez le journal télévisé parce que votre train avait du retard ou parce que vous voulez d’abord coucher les enfants, il existe depuis quelques années la fonction « Replay » auprès de nombreux fournisseurs du réseau de télévision. Pour quelques francs de plus, les émissions, séries et films restent disponibles pendant quelques jours après leur diffusion et on peut les regarder ou re-regarder plus tard.

Nicolas a aussi sa fonction Replay. Après avoir vu un épisode d’un dessin animé, il arrive qu’il le reproduise par la suite. Il prend des peluches et des playmobiles pour représenter les différents personnages de l’épisode. D’autres jouets ainsi que nos affaires du ménage représentent le décor de l’histoire. La reproduction et l’intonation des dialogues sont d’une précision remarquable. Les déplacements d’un endroit à l’autre se font comme à la télé à pied, en voiture (bobby car) ou en avion (en portant un avion jouet) d’une chambre à l’autre. Si vous avez vu l’épisode qu'il reproduit, vous vous retrouvez plongé dans l’histoire à Nicolas très rapidement.

Nicolas refait le même épisode dix ou vingt fois, parfois même plus. Pendant plusieurs jours ou même plusieurs semaines, la même histoire se répète. Contrairement au Replay à la télé qu’on peut mettre sur pause, Nicolas ne peut pas être mis en veille. L’épisode doit forcément se terminer avant de passer à table ou avant de partir.
Quand il a faim, on réalise que son épisode passe en accéléré et que certaines scènes n’apparaissent plus, on dirait qu’elles ont été coupées au montage.
Quand on doit se dépêcher pour partir chez le docteur, chaque scène est jouée dans chaque détail…

Au bout de la x-ième représentation, il change d’épisode. Je n’ai pas encore détecté ce qui provoque le changement. En a-t-il marre de cette histoire ? Ou aurait-il juste vu autre chose plus intéressant à reproduire ? Est-ce qu’il a enfin pu reproduire « parfaitement » l’ancien épisode, ce qui lui permettrait de passer au prochain ? Je ne le sais pas !

Parmi les « acteurs », il y a des peluches ou playmobiles qui changent de rôle selon la série ou l’épisode joué. Il y a aussi des figurines qui gardent leur rôle en permanence. Parmi les personnages récurrents, il y a un playmobile qui s’appelle papa – il a pris mon rôle dans le jeu à Nicolas ! C’est pratique, ce « papa » fait toujours ce que Nicolas veut. « Oui Nicolas, on va aller au Macdo. Oui Nicolas, on va acheter un jeu au magasin. » Comme je suis chauve, Nicolas a enlevé les cheveux de ce playmobile. Avez-vous déjà vu un playmobile sans cheveux ? Ce n’est pas très flatteur… il est vide à l’intérieur, il n’a pas de cerveau ! Ceci est probablement la raison pourquoi il dit toujours oui à Nicolas...

Ce mode de fonctionnement replay nous permet aussi de savoir ce qui se passe à l’école.

Si nous posons la question à nos ados comment s’est passé l’école, nous recevons un « heu ! » comme réponse. 
« Heu bien ou heu pas terrible ? » 
« Heu heu ! »
Je n'ai rien compris...

Si nous posons la même question à Nicolas, il nous regarde mais ne répond pas. Par contre, il va reproduire des scènes de l’école dans les minutes qui suivent. Il adore la gymnastique le jeudi et refait les leçons de gym à la maison. Sans qu'on le lui demande, Nicolas se met en habits de gym, pose des gobelets en plastique par terre pour représenter les cônes et slalome entre les gobelets. La laisse à Winny remplace le cerceau par terre dans lequel il faut sauter. A la fin, il vient vers moi, me tend la main en me fixant du regard et dit « Au revoir Monsieur Hervé ». J’en déduis que le prof de gym (qui s’appelle vraiment Hervé) demande aux enfants de le regarder dans les yeux en disant au revoir.

Je trouve ce comportement typique pour un enfant comme Nicolas. Il progresse car quelques mois en arrière, il aurait été incapable de faire quelque chose de similaire. Par contre, ce comportement démontre une fois de plus que Nicolas vit dans son monde et qu’il tend à s’isoler de la réalité et de son entourage..

Comme par hasard, Nicolas ne reproduit jamais les scènes où il doit s’assoir tranquillement au pupitre et écrire des lignes à l'école...

mercredi 28 août 2019

92. Greta

Vous avez entendu parler de Greta Thunberg? Cette jeune fille de 16 ans qui parcourt le monde en train et qui vient de traverser l'Atlantique en bateau pour lutter contre le réchauffement climatique en sensibilisant la population ? Je tire mon chapeau pour son engagement, son courage et sa volonté de faire ce qu'elle fait. Bravo, Mademoiselle!

Vous avez aussi entendu dire que Greta était autiste?

Quoi? Quand j'ai lu ceci, je me suis mis à la recherche de plus d'informations. A mon avis, une autiste de 16 ans n'était pas capable de parler devant des milliers de gens, devant des chefs d'état... Puis je me suis rappelé de ce que j'ai écrit dans mon dernier blog: chaque autiste est différent!

J'ai lu sur internet que Greta avait un syndrome d'Asperger et qu'elle a fini sa scolarité obligatoire avec d'excellentes notes. Depuis qu'elle a huit ans, elle a développé cette passion à sauver la planète. Elle parcourt donc la terre pour faire entendre sa cause.

Mais est-ce qu'une jeune dame qui vit sa passion est forcément une autiste? Si les médias le disent, c'est certainement que les tests adéquats ont été faits. Depuis mon fauteuil à la maison, je l’ai observé lors d’interviews ou de discours. 
- Lorsqu’elle s’adresse à un large public, il est difficile de se rendre compte de son syndrome d’Asperger. Elle a probablement développé sa stratégie en fixant du regard un point au-dessus du public et en ayant appris par coeur son discours.
- Lors des interviews, ses yeux balancent de la caméra au journaliste puis ailleurs... elle ne sait pas où regarder! A mon avis, ceci n'est pas dû à la présence de caméras, c'est bien un indice qu’elle soit effectivement autiste.

Elle a une passion énorme et elle y met toute son énergie. Cela est aussi typique pour les autistes. Je suis content que sa passion est de s'investir pour le climat et pas dans la recherche sur la vie des Pokémon.


Nous aussi, en plus de Nicolas, nous avons un autiste Asperger de seize ans a la maison. 

"Trop cool! Ton fils va pouvoir changer le monde, comme Greta Thunberg! Il a le même âge et le même syndrome!"

Honnêtement, vous aimeriez, vous, voir votre fille de 16 ans traverser l'Atlantique sur un voilier, barré par le fils d'une princesse de Monaco? Ou dormir sous tente à Davos en pleine hiver?


Non? Je vous rassure, ce n'est pas le cas chez nous. 

Tous les autistes Asperger ne changent pas le monde, tout comme tous les afro-américains de Chicago ne sont pas devenu président des Etats-Unis. Tous les Valaisans ne sont pas des professionels du ski, tous les Fribourgeois ne chantent pas le ranz des vaches sur les alpages...



En fait, beacoup de personnes Asperger sont au chômage (certains parlent de 90%) et vivent avec un minimum ou de l’aide sociale. Pas parce qu’ils seraient stupide ou fainéants mais parce qu’ils n’arrivent pas à s’intégrer socialement dans un environnement de travail.


Mon fils ne parcourt pas le monde à militer pour l’environnement. Il a fini sa scolarité obligatoire mais les derniers mois furent la galère. Pas parce qu’il serait en difficulté scolaire mais parce que la matière ne l’intéressait plus. On parle d'un "Bore-out" (de l'anglais "boring" - ennuyant).

En fait, depuis que notre premier fils a réalisé que sa grande passion - les dinosaures - ne reviendraient plus sur terre, il n’y a pas grand  chose qui l’intéresse. Jeux vidéos et téléphone portable sont devenus le centre de la vie. On a essayé de lui retirer ces appareils, cela a empiré la situation. 

Nous espérons maintenant qu'il trouvera du plaisir aux études qu'il vient de commencer pour qu'il puisse choisir plus tard un métier qui lui conviendra. Ce sera sans doute un métier où il pourra travailler tout seul dans son coin.

Et Greta Thunberg? Que fera-t-elle quand elle aura fini à militer pour une terre plus propre - ou quand elle devra gagner sa vie? J’espère sincèrement qu'elle pourra continuer à se faire entendre, par exemple en politique! Et surtout qu'elle puisse vivre de sa passion!

mercredi 21 août 2019

91. Lu, entendu... et commenté!

Quand je voyage en train, par exemple pour aller au travail, il m'arrive de lire un livre ou un article ou de regarder une émission de télévision en replay sur mon portable. Souvent, il s'agit de reportages ou d'autres blogs sur l'autisme.

Il m'arrive aussi de suivre des conférences sur l'autisme lorsque celles-ci ont lieu un soir, ou de prendre congé un jour si le sujet m'interpelle beaucoup.

Vous lirez ci-dessous quelques citations lues et entendues ces derniers mois, groupées et commentées à ma façon:

Quotidien
"Il existe autant de formes d'autisme que d'autistes."
"Si vous connaissez un autiste, vous connaissez exactement un autiste."
"Connaître un autiste n'est pas la même chose que vivre avec un autiste."

Commentaire: C'est vrai, chaque personne avec un TSA est probablement unique dans sa façon d'être. Par contre, vivre avec l'un d'eux demandera toujours beaucoup d'adaptations à son entourage.

Philosophe
"Celui qui considère l'autisme trop sérieusement, qui n'en voit que les points négatifs et non les points positifs, doit être énormément frustré. Si nous ne pouvons pas en rire de temps en temps, c'est que nous ne prenons pas l'autisme au sérieux."

Commentaire: Il me reste du chemin à parcourir même si j'ai fait des pas en avant ces derniers mois.


Economique
"Actuellement, une naissance sur cent en Suisse est atteinte d'autisme. Parmi ces enfants-là, un sur trois aura besoin de soutien externe durant toute sa vie. Durant sa vie, les coûts liés à ce soutien sont estimés à quinze millions de francs (CHF 15'000'000)."
"Il existe actuellement un manque de professionnels qualifiés dans la détection de l'autisme en Suisse. Faute de ressources ou de connaissances, il arrive fréquemment qu'un diagnostic est posé après plusieurs années seulement."
"Une thérapie précoce pour un enfant autiste devrait être entamée le plus rapidement possible. Les chances de réussite sont les plus grandes si la thérapie est effectuée avant que l'enfant ait atteint l'âge de quatre ou cinq ans."
"Une thérapie précoce coûte entre 80’000 et 100’000 francs par an. En remplissant toutes les conditions, l'assurance-invalidité prend en charge au maximum une fois CHF 45'000, et ce depuis 2014."
"Au bout de deux ou trois ans de thérapie précoce, l’enfant autiste a de bonnes chances de gagner en indépendance et d’intégrer un cursus scolaire classique."
"Faute de places de thérapie en Suisse," (et probablement de finances aussi...) "seulement un tiers des enfants qui devraient bénéficier d'une thérapie précoce en bénéficient effectivement."

Commentaire: Certes, ce sont des grands chiffres. Par contre, il ne faut pas forcément être mathématicien pour se rendre compte que mettre l'accent sur la détection de l'autisme et investir dans les thérapies précoces permettrait au système d'économiser des milliards par la suite.

C'est une année électorale en Suisse, est-ce que des candidats voudraient se greffer sur ce sujet? Contactez-moi...