samedi 25 mars 2017

9. Inspection!

Aujourd'hui, je vous transmets ce que j'ai vécu lundi passé. Si des fois, j'ai peut-être une légère tendance à l'exagération afin de rende un texte plus amusant (voir https://nicolas-autiste.blogspot.ch/2017/02/alarme.html), je vous jure que ce qui suit est la vérité (à part le nom de Madame l'inspectrice), toute la vérité et rien que la vérité!

L'Assurance invalidité (AI) est une assurance sociale pour aider les personnes (pour les mineurs leurs familles) qui sont atteints d'une invalidité en Suisse. Le but premier est de réintégrer les personnes atteintes sur le marché de travail et, si ceci n'est pas possible, d'octroyer une rente aux bénéficiaires qui devrait leur permettre de survivre. Suite au nombre croissant de bénéficiaires ces dernières années (invalidités psychiques surtout), l'AI a dû faire face à des pertes lesquelles sont censées être couvertes par une augmentation des cotisations AI (perçu sur le salaire de chaque ouvrier) ainsi que par une baisse des prestations de l'assurance. 

Si les lois et directives de l'AI sont identiques dans toute la Suisse, chaque canton s'organise à sa façon pour gérer les demandes et le suivi des bénéficiaires. Parmi les professionnels de la santé, l'office cantonal de l'AI de Fribourg a la réputation d'être particulièrement restrictif et sévère. Sur son site internet, l'office fribourgeois publie ses valeurs de travail en majuscules: DISPONIBILITE - TRANSPARENCE - CONFIANCE - RESPECT - EQUITE

En printemps 2015, nous avons fait une demande de prise en charge des mesures médicales (médecin, psychiatre, logopédiste etc.) de Nicolas et une deuxième demande pour une allocation pour impotent (une sorte de "salaire" mensuel allant de 470 à 1175 francs) pour la personne qui s'occupe de l'invalide à son domicile et qui ne peut donc pas exercer une autre activité professionnelle. Le principe me paraît juste, l'allocation par contre est basse si l'on compare combien de frais occasionnerait l'invalide dans une institution. Les montants sont fixés au niveau national, nous ne pouvons pas l'influencer... et c'est mieux que rien!

En novembre 2015, une inspectrice - Madame Stirnimann* - nous a rendu visite à la maison. Je ne dis pas qu'elle nous a inspecté, elle semblait plus intéressée par notre appartement que par Nicolas. Elle n'a jamais entendu dire qu'un diagnostic d'autisme pouvait tomber avant l'âge de 8 ans et a prétendu que la garde d'un enfant autiste ne demande pas plus de temps ou d'énergie qu'un autre enfant de son âge. La suite logique est que l'allocation nous a été refusée en août 2016 et que l'office AI de Fribourg nous a informé que nous avons la possibilité de déposer une nouvelle demande en novembre 2016, quand Nicolas aura eu 4 ans. Nous avons fait recours à cette décision auprès du Tribunal Cantonal et attendons un jugement.

Comme suggéré par l'AI, nous avons formulé une nouvelle demande fin octobre 2016 dans laquelle nous avons explicitement demandé d'être inspecté par un autre inspecteur que Madame Stirnimann*. 

Il y a 3 semaines, Madame Stirnimann* nous appelle pour l'inspection. J'ai par la suite appelé l'office AI pour demander de changer d'inspecteur, mais il m'ont fait comprendre que ceci n'était pas possible sauf si nous avions des raisons qui justifieraient un changement (dans leur point de vue, pas du notre). Nous avons donc pris rendez-vous avec Madame Stirnimann* pour lundi passé.

Par chance, notre pédopsychiatre - une sommité dans le suivi des enfants autistes en Suisse romande - était à Fribourg le même jour. Elle a proposé de nous accompagner lors de cette inspection pour expliquer à l'inspectrice ce qu'est l'autisme et quelles sont les influences sur les proches. Notre pédiatre s'est également proposée afin de témoigner du suivi médical de Nicolas étant donné que Mme Stirnimann* ne croyait pas qu'un enfant en dessous de 8 ans pouvait être autiste. Nous avons informé Mme Stirnimann* par e-mail de la liste des présences une semaine avant le rendez-vous. 

Le jour J, Madame Stirnimann* est arrivée à l'heure. Pendant les 20 minutes que son ordinateur portable à mis pour se mettre en marche, elle s'est dite surprise que nous soyons si nombreux à l'accueillir. Nous (la pédopsy, la pédiatre et les parents, donc 4 personnes) nous sommes présentés une deuxième fois et avons expliqué les rôles de chaque personne présente. Madame Stirnimann* nous a distribué 1 (un!) exemplaire des directives internes AI en allemand (qui est heureusement ma langue maternelle, ce qu'elle ne savait pas) puis elle a commencé à nous poser des questions sur Nicolas. Sa façon d'être nous a donné l'impression d'être des criminels, des profiteurs, des mendiants, des moins-que-rien... parce que nous avons osé faire une demande à l'AI. Vous savez, il y a énormément d'abus, c'est pour cela que les inspecteurs doivent s'assurer qu'il n'y ait pas de tricherie! nous a-t-elle expliqué.

Pendant 1 heure, Madame Stirnimann* nous a donné des conseils que si Nicolas n'est pas encore propre à 4 ans et demi, nous devrions enfin essayer de le rendre propre. Et si un repas en famille prend facilement 90 minutes, il faudrait attacher Nicolas sur sa chaise pour qu'il arrête de bouger! Elle n'a presque pas pris de notes, elle se rappellera de ce qui s'est dit quand elle écrira son rapport.

J'ai beaucoup expliqué comment se passe la vie à la maison. J'ai senti monter la moutarde chez Francine (mon épouse) qui ne s'est pas beaucoup exprimé afin de ne pas exploser devant l'inspectrice.

Quand notre pédopsychiatre a expliqué à Madame Stirnimann* pourquoi un enfant autiste met du temps à devenir propre, cette dernière lui a posé la question si elle avait déjà eu affaire à un enfant autiste. Oui, je ne vois que des enfants autistes depuis 15 ans! Gênée, Mme Stirnimann* a vite changé de sujet. 

Notre pédopsychiatre a expliqué que dans le canton de Vaud où elle pratique, l'AI tenait compte de la surveillance intensive que nécessite un tel enfant. Connaissant son règlement, Mme Stirnimann* a expliqué que la surveillance intensive ne pouvait pas entrer en vigueur avant l'âge de 6 ans. Connaissant mieux le même règlement, la pédopsychiatrie lui sort le même article et indique - 1 ligne plus loin - que pour les autistes, la surveillance intensive peut être prise en compte dès 4 ans. Nous apprenons alors que dans le canton de Fribourg, ceci n'était pas possible parce que la direction ne le veut pas. Ceci couterait trop d'argent.

Est-ce que le canton de Fribourg n'applique donc pas les mêmes lois que les autres cantons? Non... enfin si... mais la direction ne veut pas... mais... bref, c'est comme ça! Prochaine question!

Au bout d'une heure et demie, nous nous disons Au revoir. Madame Stirnimann* me pose la question quel était mon nom. Matthias Antille. Oh, quel hasard, vous avez le même nom de famille que Nicolas! s'exprime-t-elle! Ben... oui, je suis le père! Ah, vous êtes le père? Je croyais que vous étiez aussi un de ces thérapeutes!

Le résultat des courses: 90 minutes de perdues et probablement un prochain refus d'ici la fin de l'année. Je comprends mieux pourquoi l'AI Fribourg est plus sévère que l'AI d'autres cantons. Par contre, je ne comprends pas pourquoi on peut laisser juger des gens qui ne comprennent rien. Chez nous, un soutien financier serait le bienvenu, mais notre survie n'en dépend pas. Comment font les gens invalides qui ont besoin d'argent pour survivre et qui se font inspecter par Madame Stirnimann*???

J'ai décidé d'écrire à la direction de l'AI Fribourg pour leur poser la même question. Je vais aussi leur demander d'enlever leurs valeurs DISPONIBILITE - TRANSPARENCE - CONFIANCE - RESPECT - EQUITE du site web.



*Madame Stirnimann n'est pas son vrai nom. Afin de la protéger, je ne citerai pas le vrai nom de cette personne germanophone.

3 commentaires:

Unknown a dit…

La semaine fut difficile après cet entretien. J'étais totalement cassée 😢
J'avais mis tant d'énergie à préparer ce rendez-vous et le résultat est si frustrant et démoralisant
Nicolas a fait plusieurs gros progrès cette dernière semaine est-ce un signe d'encouragement de sa part ? Un chose est sûre c'est un immense rayon de soleil pour notre famille

Unknown a dit…

Cher Francine nous nous sommes parlé ce matin au supermarché. J'ai pensé à toi et en rentrant je suis venue sur le blog pour le moment j'ai lu que le point 9, je ne trouve pas les mots mais vous êtes des parents sûrement exceptionnels et certaines ne devraient pas exister ou du moins faire en tout cas pas le métier qu'ils font j'espère pour eux que s'ils ont des enfants qu'ils soient en bonne santé et qu'ils ne vivent pas dans le canton de Fribourg, vous êtes un exemple d'amour et de force et j'espère que Dieux vous le rendra bisous Silvia

Anonyme a dit…

Chers Parents, je suis choquée d'apprendre encore une fois une histoire ahurissante concernant l'AI!(car d'autres exemples du même genres j'en connais pas seulement à Fribourg!)....Je pense très fort à vous tous. Fantastique blog, l'on ressent un grand amour, plein de recherches pour mieux gérer le quotidien de Nicolas, plein de comprehensions, d'observations je vous admire! Bravo!