mercredi 30 décembre 2020

127. Annus horribilis?

Actuellement, les gens ne se souhaitent plus une "bonne année" mais une "meilleure année". 

En effet, l'année qui se termine a commencé par un virus en Chine qui a amené une peinurie de papier toilettes dans la riche Suisse. Il y a eu la proclamation officielle de la pandémie, la première mobilisation de l'armée Suisse depuis la deuxième guerre mondiale, le confinement, pas assez puis trop de masques, encore plus de peurs provoquées par des ordres puis contre-ordres donnés par nos autorités. 2020 aura vu apparaître (et disparaître) des spécialistes dans beaucoup de domaines et la naissance de petites gueguerres entre la Confédération suisse et les cantons

Pour certains, hélas, l'année 2020 aura aussi été celle du départ d'un ou plusieurs proches. L'année qui touche à sa fin était horrible! 

Je n'ose presque pas le dire, mais pour nous, l'an 2020 était la meilleure année depuis longtemps! J'ai eu la chance de pouvoir continuer à travailler même s'il fallait s'adapter et être plus flexible. Grâce au télétravail, il n'y avait presque plus de trajets pour aller au bureau, j'ai donc gagné du temps précieux pour la famille. Mon employeur a versé le salaire ponctuellement et dans son intégralité, ce qui a aidé pour tout le reste. 

Avec Nicolas, nous étions habitués à un état de confinement depuis bientôt 8 ans, parce que nous avons réalisé depuis longtemps que c'est à la maison que ça se passe le mieux avec lui. Bien avant le confinement, nous avons biffé de notre quotidien les repas au restaurant et les voyages à l'étranger.

Par contre, 2020 a été l'année des grands changements chez nous. L'école à la maison dès la mi-mars nous a fait réaliser une fois de plus quel potentiel dormait en notre petit Nicolas. Le déménagement durant l'été fut un grand pas pour toute la famille : le fait de partir du centre-ville pour habiter dans un quartier rural a permis à Nicolas de s'ouvrir encore et encore. Le changement de canton a permis à notre fiston de fréquenter un programme scolaire digne de ce nom. Et le changement géographique nous a permis de trouver des nouvelles thérapeutes, très bénéfiques pour Nicolas.

Certes, tout cela a demandé un engagement exceptionnel, de la persévérance, de la force et beaucoup d'énergie, sussi de la chance. Mais le résultat est positif. Tout travail mérite son salaire.

Donc, ceux qui me souhaitent une "meilleure année", je leur réponds tout égoiste : "Merci, mais la même me suffirait!"

A vous, tout en vous remerciant de votre fidèle lecture, je vous souhaite une excellente année 2021 remplie de bonheur et de santé!

mercredi 23 décembre 2020

126. Muet

"Muet, ça s'écrit avec un T à la fin. Mais on ne dit pas le T, c'est un T muet. Quand c'est le pluriel, on ajoute un S qui est aussi muet." Paroles de Nicolas, futur prophète de la grammaire française. 

Puis il ajoute: "On dit le T quand c'est féminin, mais là on écrit muette, avec TTE à la fin. Et quand c'est le pluriel, on ajoute un S. Le S ne se prononce pas, il et muet."

Nicolas adore prendre le train. Pour lui faire plaisir, nous faisons régulièrement des trajets en train le week-end. Nicolas connait tous les arrêts sur les différents parcours que nous prenons. Il est tellement content qu'il a de la peine à se contenir, il devient agité. Nicolas n'arrive pas à rester assis, il parcourt les couloirs en annonçant les prochaines gares, bien avant que le haut-parleur du wagon ne le dise: "Ding-ding-ding. Prochain arrêt, Domdidier. Domdidier, ça s'écrit avec un R, mais le R ne se prononce pas. Il est muet. ER ça se dit é." 

Quelques passagers regardent et sourient, d'autres l'ignorent.

Le train repart. "Ding-ding-ding. Prochain arrêt, Avenches. Ça s'écrit avec un S à la fin. C'est un S muet, on ne dit pas le S."

Nicolas prend le souffle: "Ding-ding-ding. Prochain arrêt, Faoug. Faoug, ça s'écrit avec un G à la fin, mais le G ne se dit pas. C'est un G muet." 

"Ding-ding-ding. Prochain arrêt, Morat..." Oui, vous devinez juste, le T ne se prononce pas, Nicolas le proclame à haute voix. Les passagers qui ignoraient Nicolas avant lèvent leurs yeux au ciel. Deux personnes âgées assises à côté de nous soupirent. Eux, ils l'entendent depuis un quart d'heure. Que devrais-je dire, moi?

Nous sortons à Morat pour acheter une tarte à la crème à la boulangerie avant de prendre le prochain train qui nous ramène à la maison. Nicolas voit toutes les douceurs dans la vitrine et voudrait acheter un petit pain au chocolat, voeu que je lui accorde. En mâchant son snack, il dit: "Pain au chocolat, ça s'écrit avec un T. On ne dit pas le T, il et muet." Il réfléchit avant d'ajouter "Dans pain, il y a un N. C'est un N muet..."

A croire que toutes les lettres peuvent être muettes, mais quelqu'un ne l'est définitivement pas: Nicolas.

Je ne me plains pas du tout! Il y a 3 ans, Nicolas commençait tout juste à parler. Il a commencé à suivre un programme scolaire digne de ce nom 4 mois en arrière. Il a appris énormément de choses en peu de temps, et il s'en souvient. C'est super ce qu'il fait. Un beau cadeau de Noël!

C'est juste qu'au bout de quelques arrêts de train, ses paroles saoulent. Pas besoin de sabrer le Champagne pour les fêtes, écouter Nicolas fait le même effet que quelques bonnes bouteilles...

Joyeux Noël!



PS: "Noël, il y a deux points sur le E. Ca s'appelle un accent tréma..."

jeudi 17 décembre 2020

125. Enquêtes et études

Avant d'obtenir le diagnostic de TSA (trouble du spectre de l'autisme) pour Nicolas il y a cinq ans, mes connaissances en autisme se limitaient au film Rain Man. Depuis, le quotidien avec mon fils m'a beaucoup appris... par exemple que ce film avec Dustin Hoffman n'est plus d'actualité de nos jours. En 2020 encore, je réalise tous les jours que mon apprentissage n'est de loin pas terminé.

Nous parlons de Nicolas et d'autisme en général autour de nous pour que notre entourage comprenne un peu mieux ce que nous vivons. J'écris ce blog depuis quatre ans en espérant participer à une meilleure connaissance de l'autisme dans la population.

En tant que parents d'autistes, nous participons régulièrement à des études liées à l'autisme. Nous participons à des visioconférences, remplissons des questionnaires, passons des longs moments au téléphone avec les enquêteurs pour parler du quotidien en tant que maman, des comportements défis d'un jeune autiste, pour tester la réaction d'un jeune TSA lorsqu'on lui présente des images, évoquer les aides concrètes qu'on aurait besoin, évaluer les prestations de l'assurance-invalidité, etc. 

Les enquêtes se font par différentes universités, des associations nationales ou régionales, des étudiants Bachelor ou des jeunes qui écrivent leur travail personnel de maturité. En contrepartie pour notre participation à l'étude, nous demandons juste une copie par e-mail du document présenté lorsque le travail est terminé.

Au début, je me suis senti honoré de pouvoir participer à ces études. Mon feedback aidera à situer les problèmes et à y remédier. Mes commentaires allaient améliorer le monde.

Avec le temps, n'ayant reçu que deux fois un retour concret, j'ai hésité à donner de mon temps... mais j'ai continué à le faire. Trop souvent, il fallait multiplier par deux ou trois le besoin de temps nécessaire indiqué lorsque l'étude nous a été présenté. Le fait de faire plus d'une heure de trajet pour la participation n'a pas été honoré par un merci. L'interview sensée durer une heure a pris la soirée entière, ou il fallait bloquer les six prochains samedis à 15h00 précises pour raconter notre semaine par Skype à un jeune doctorant. Pas de possibilité de décaler le rendez-vous de quelques heures: "Ah non, je ne travaille pas le samedi soir!" Et pourtant, c'est votre thèse, pas la mienne.

Si des jeunes étudiants obtiennent de bonnes notes grâce à leurs recherches sur un sujet "moderne" et leur engagement, certaines études professionnelles et très complètes sont transmises à nos autorités politiques, aux diverses administrations, aux assurances sociales dans le but de modifier quelque chose de concret. 

Les résultats de ces études sont toujours très semblables et reflètent ce que nous (et d'autres parents) répondons lors des enquêtes:

- L'autisme existe réellement. De plus en plus d'enfants sont touchés. Actuellement, ce chiffre s'élève à 1 enfant sur 65 environ.

- Il n'y a pas assez de capacités pour diagnostiquer un TSA en Suisse. Souvent, plusieurs années s'écoulent entre les premières suspicions et la pose du diagnostic.

- Une prise en charge précoce est hautement recommandée et utile pour les enfants avec autisme. Si les thérapies ont lieu au plus jeune âge, il y a de bonnes chances d'améliorer le quotidien de la personne touchée et de toute la famille.

- Les familles avec des jeunes autistes sont souvent désemparés et auraient besoin d'un accompagnement professionnel, d'une prise en charge ponctuelle de l'enfant, des participations financières pour les thérapies... et de soutien psychologique.

Une grande étude a été menée en 2015 sur le plan national. Suite à cela, le Conseil fédéral a émis en 2018 des recommandations aux cantons. Il entend encourager les personnes avec TSA de manière à ce qu'elles puissent participer aussi pleinement que possible à la vie sociale. Il a fixé dans ce but trois axes d'intervention prioritaires: 1) Le dépistage précoce, 2) le conseil et la coordination, ainsi que 3) l'intervention précoce. 

Depuis ces recommandations, peu a changé. Pire encore, des cantons vont à l'encontre des recommandations du Conseil fédéral. Les capacités de détection ont été réduites. Nous ne trouvons pas la moindre trace d'une coordination entre les offices touchés. L'assurance invalidité a revu sa pratique et réduit les prestations.

A quoi servent donc ces études? A occuper des enquêteurs et à remplir des classeurs fédéraux? Ou à se donner la bonne conscience?

De mon côté, j'ai déchanté. J'ai perdu ma naïveté et mon espoir d'améliorer le monde. Je garderai dorénavant mon temps et mon énergie pour moi et ma famille. Je refuserai de participer à d'autres enquêtes.

J'aurai plus de temps et je continuerai d'écrire :-)


vendredi 27 novembre 2020

124. Un matin comme tous les autres

5h45 : Nicolas se réveille. Il dormait encore profondément il y a trente secondes, là il me demande « on peut se lever ? » Oui, je suis à côté de lui car cette nuit, c’est moi qui ai dormi sur le matelas posé par terre dans sa chambre. On se relaie avec mon épouse depuis que nous avons déménagé car Nicolas ne veut / ne peut plus dormir seul. Nous essayons de revenir à une normalité mais cela s’avère plus compliqué que prévu. Quand il se réveille la nuit, il s’assure qu’il y ait bien quelqu’un à côté de lui. Si ce n’est pas le cas, il descend (tout endormi) l’escalier et vient dans notre chambre nous réveiller. Un déménagement reste un grand changement pour un autiste même si, au fond, nous avons déménagé pour son bien.

6h05 : Après avoir posé quinze fois la question « on peut se lever ? », je lui dis que oui. D’un pas lourd (l’arthrite juvénile est bien présente), Nicolas descend l’escalier et se dirige vers le planning journalier. Le niveau sonore monte : « Non, je ne veux pas prendre la douche ce soir ! » Nicolas n’aime pas les douches. Il faut quand même se laver. Il s’énerve, il crie, il hurle. J’enlève le picto « douche » pour qu’il ne réveille pas les autres et je sais déjà que je mets en péril la douche du soir, étant donné que le picto ne figurera plus sur le planning.

7h00 : Nicolas déjeune. Maman a mélangé les médicaments contre l’arthrite dans la pâte à tartiner mais Nicolas n’a pas faim. Il saute, il court, il joue, mais il ne mange pas. Au bout d’une demi-heure, il a mangé morceau par morceau de sa tartine… ou est-ce le chien qui aurait avalé le pain-nutella-médicaments ?

8h15 : Depuis mon bureau télétravail, j’entends ma femme motiver Nicolas : « Habille-toi », « vas-y », « dépêche-toi, on doit partir dans dix minutes ». Mais Nicolas n’aime pas la couleur du pantalon noir qui allait très bien la semaine passée. L’étiquette du t-shirt le chatouille dans le dos, elle sera donc coupée en deux temps trois mouvements. Les autistes ont une sensibilité que nous, les neurotypiques, ne comprenons pas toujours.

« Je ne veux pas mettre le pull, il fait chaud dehors ! » Ah non, il a gelé… Les décibels montent de nouveau, la résistance de mes nerfs baisse. Et pourtant, je suis dans la pièce à côté en train de télétravailler. Ce n’est pas moi qui m’occupe de mon fils !

8h25 : Plus que le brossage des dents (Nicolas n’aime pas le goût du dentifrice… d’aucun dentifrice !), mettre les chaussures (il y a une saleté dessus), la veste (je ne veux pas, il fait chaud dehors) et le bonnet et hop, loin. 

8h30 : Je décide de faire une pause au travail et d’accompagner mon fils et ma femme à l’école. Nicolas est content d’aller à l’école, il aime son pantalon noir et est content d’avoir mis la veste chaude.

Au premier virage, le chien des voisins aboie. Nicolas crie. Le chien a peur des cris et crie plus fort, Nicolas a plus peur et crie encore plus fort. Au bout de cinq minutes et cinquante mètres, Nicolas s’est un peu calmé, et nous poursuivons notre chemin. 

Au bout de 200 mètres, il y a un chantier. Aujourd’hui, une grande bétonneuse bloque une partie du chemin. Nicolas râle parce qu’il ne peut plus longer la haie verte à gauche du chemin, il doit dévier de son chemin habituel et longer la droite du trottoir. Le camion démarre et freine de suite, le bruit du moteur qui accélère est enchaîné par celui des freins qui grincent. Nicolas sursaute et crie, il a eu peur.

Nous traversons la rivière par la passerelle. Un ouvrier de la voirie souffle les feuilles avec un gros engin, c’est le prochain bruit qui apeure Nicolas. Le balayeur comprend, il s’arrête et nous dit bonjour, Nicolas repart en cris : « Noooon ! Je ne veux pas dire bonjour au monsieur ! Pas dire bonjour ! » Dix mètres plus loin, Nicolas se retourne et dit au revoir à l’ouvrier...

8h42 : En arrivant à l’école, l’assistante à l’intégration vient chercher Nicolas deux minutes avant la sonnerie afin d’éviter la cohue quand tous les enfants entrent en criant. Elle est sympa, tout le monde ne fait pas l’effort d’arriver en avance. Juste quelques secondes pour transmettre l’information la plus pertinente parce que Nicolas ne supporte pas d’attendre… « Oui, tout va bien. Rien de spécial. Comme d’hab. »

8h45 : La cloche sonne. Deux cent gamins foncent vers la porte d’entrée en courant et criant. Comment va réagir Nicolas avec tout ce bruit ? Est-ce qu’il va se faire écraser par la foule qui court ?

Je dis à ma femme que le trajet ce matin était compliqué. Elle me regarde d’un air surpris et m’assure que c’était comme toujours. Même mieux, il n’y avait pas de pluie aujourd’hui, Nicolas ne supporte pas les habits mouillés.

8h55 : Je reprends mon télétravail alors que mon épouse part promener le chien. La journée vient de commencer, je suis déjà fatigué mentalement !

Le week-end, quelqu’un qui connaît Nicolas me dit que notre petit fait des super progrès, qu’il s’ouvre au monde, que tout a l’air d’aller bien. On a de la peine de croire qu’il est autiste…

Moi pas !

 

 

dimanche 8 novembre 2020

123. L’école de vie

Depuis la rentrée fin août, Nicolas est scolarisé. Et même si la poussée d'arthrite et les différentes thérapies l'empêchent d'aller à l'école à 100%, il suit le programme scolaire comme ses camarades. 

Les chiffres, c'est son truc. La lecture un peu moins (même si cela lui permet de lire ce qui est écrit sur les panneaux routiers), l'écriture reste difficile avec sa motricité fine pas très développée. Nicolas récite les mêmes poésies et chante les mêmes chansons que les autres... lorsqu'il est à l'école!

A la maison, c'est plus compliqué. Nicolas n’aime pas faire les devoirs. Il ne voit pas pourquoi il devrait réciter les poésies ou chanter devant nous. Un vrai rebelle... Mais nous constatons les progrès parce qu'il arrive à lire plus vite les inscriptions du paquet de corn flakes ou la brique de lait. Pour l'instant, toutes les notes reçues à l'école sont bonnes ou assez bonnes.

En regardant ses résultats, je me pose la question pourquoi d'autres cantons refusent une scolarité normale à un enfant comme Nicolas. Il m'arrive même de penser qu'il aurait "guéri" de son autisme - en sachant qu'on nait autiste et qu'on le reste toute sa vie.

Et c'est à ce moment qu'arrive en retour le dernier test de maths. Sur les pages matheuses, celles avec les chiffres, tout est juste. Juste une petite erreur de concentration, 31 points sur 32. Bravo!

Hélas, une page additionnelle a été glissée dans le test sur laquelle il fallait entourer des fleurs pour faire des paquets de dix, compter les étoiles, relier des objets... Toutes ces tâches étaient sur la même page, bien compressées pour en mettre un maximum sur la feuille. C'est à ce moment que l'autiste n'arrive plus à suivre. La feuille lui paraît désordonnée, il se concentre sur les dessins. Les détails l'empêchent de voir l'image globale, de se concentrer sur la tâche. Zéro points sur les six possibles de cette page ce qui ampute un peu son résultat (qui reste bon).

Dès le début, nous avons rendu l'enseignante attentive que les feuilles trop colorées ou avec trop de choses différentes déconcentraient un enfant autiste. Mais comme il suit le programme normal, il remplit les mêmes fiches. Dans la vie, il ne peut pas demander des exceptions tout le temps.

Parce que dans la vie, les tickets de caisse au magasin comporteront des dessins? Il devra entourer les fleurs sur sa déclaration d'impôts? Quand il travaillera à la NASA, en calculant la distance entre la terre et la voie lactée, il devra encercler les comètes? Bref...

Même avec ce petit bémol, je reste d'avis que le changement de canton en valait bien la peine. A Fribourg, il n'aurait pas eu droit de faire un test de maths...

vendredi 9 octobre 2020

122. Jour 1

J'aime jouer. Avec Nicolas, je joue quasiment tous les jours. Hélas, Nicolas n’a jamais joué avec moi. Certes, je lui cours après, je le chatouille, on rigole ensemble. Je lui monte des circuits de train, des maisons en légo, des tours en briques de bois. Une fois préparé le terrain, Nicolas joue. 
Mais jamais, nous n’avons joué ensemble. 
Jamais il ne m’aurait laissé participer à son histoire. 
Jamais il ne m’a prêté une figurine qui aurait pu, elle, s’intégrer dans son histoire. 
Pour un papa, joueur ou non, ceci est frustrant!

Et tout à coup arriva le jour 1. En fait, c’était le jour 2891 de sa vie, mais vu l'évènement j’ai décidé de remettre le compteur à zéro: Nicolas joue avec moi! 

Après le souper, j’ai eu droit à ma figurine qui, elle, reçu un rôle dans son univers de jeu. Et comme cette figurine a fait rire Nicolas, s’en est suivie une deuxième et même une troisième. Nicolas était aux anges, il rigolait... il pleurait de rire, il ne voulait pas aller dormir alors que ses yeux tombaient. 

« Bonne nuit, Nicolas! »
« Papa, demain tu joues avec moi après le souper? »
« Oui, Nicolas. »
Roooooonfle...

Jour 2: en se réveillant, Nicolas demande à maman: 
« Ce soir, je peux jouer avec papa? » 
Il paraît qu’il a posé la même question une vingtaine de fois avant que je rentre du travail. Au repas du soir, Nicolas n’a pris qu’une petite portion avant de ranger son assiette et de me tirer par là manche pour monter dans sa chambre. La joie était lisible sur son visage!

Allongé sur le sol de sa chambre, j’ai eu droit au récit de la même histoire que mes trois figurines avaient joué la veille. Mais je n’étais plus l’acteur, j’étais spectateur. Mes tentatives de reprendre au moins l’une des figurines et de modifier l’histoire ont échoué. Au bout du troisième essai, Nicolas a sorti une nouvelle figurine de la caisse, me l'a donnée, mais cette dernière n’a pas réussi à s’intégrer dans l’histoire.

Jour 3: idem au jour 2, sauf que je n’ai pas eu besoin de demander pour recevoir la figurine. 
« Papa, tu joues avec Suma, le chien. » 
C'est comme au cinéma, le même film tous les soirs. Avec moi comme seul spectateur. Et une figurine dans ma main qui n'a pas envie de regarder le film mais d'y participer.

Jour 4: Rebellote! Sauf que Nicolas se met entre son terrain de jeu et moi, par peur que ma figurine pénètre sur sa surface.

C’est l’autisme, les choses se répètent. Toujours cette joie d’attendre papa qui doit « jouer » avec. Toujours le même jeu, toujours la même histoire. Hier soir, je me suis installé sur son lit, bien plus confortable que le tapis par terre. Et la figurine a lu les nouvelles sur mon portable avec moi.

Nicolas adore jouer avec son papa! 
J’ai adoré le jour 1, un nouveau chapitre à commencé. Comme chantait Louane:

« C’est le jour 1, celui qu’on retient, celui qui s’efface quand tu me remplaces... »

« Je veux un jour numéro 2... »

Le jour 2 a été chouette aussi. Mais je n’ai pas eu besoin d’attendre 100 jours pour avoir un « jour sans » comme la chanteuse.

Là, je sais que Nicolas est prêt pour le prochain « jour 1 ». Il arrivera peut être dans une semaine, dans un mois... ou plus tard. Ce nouveau jour 1 ouvrira encore un nouveau chapitre qui se chevauche avec d’autres chapitres ouverts dans notre vie.

Au moins, chaque nouveau chapitre nous permet d’aller de l’avant. Parce que le livre de la vie se lit depuis le début.


mardi 29 septembre 2020

121. Aller de l'avant, c'est bien. Faire attention, c'est mieux!

Un grand comique allemand - Otto - a raconté l'histoire de sa grand-mère qui est tombée de l’échelle en lavant ses vitres. Son médecin lui a donc interdit de monter sur les échelles pendant le rétablissement. Depuis, il a peur pour sa grand-maman à chaque fois qu’elle grimpe les gouttières lorsqu'elle lave ses fenêtres...

Pourquoi ce gag débile pour commencer ce blog? Parce que Nicolas fait un peu la même chose que cette vieille femme: il fait n’importe quoi pour atteindre son objectif!

Il a une tête dure comme le granit valaisan. Quand il a une idée en tête, il ne l'a pas ailleurs...

Comme les pleurs et les cris ne servent à plus grand chose devant ses parents devenus durs comme du rock et insensibles aux décibels, Nicolas invente des stratégies pour arriver à ses fins par ses propres moyens.

Un bruit récurent et strident sort du salon: iiiii-iiiii-iiiiiiiiiii. Nicolas pousse la grande chaise à travers la pièce pour accéder au planning journalier, accroché à deux mètres de hauteur, justement pour qu’il ne puisse pas y toucher! Il décroche le planning, enlève la douche et sa tâche ménagère - mettre la table - pour grimper à nouveau sur la chaise et accrocher le planning en espérant que nous n'ayons rien vu.

Résultat des courses? Nicolas a quand même mis la table, pris sa douche... et nous avons baissé le clou de 50 centimètres pour qu'il arrête ses acrobaties.

Un grand bruit parvient du jardin: Pinggggggg! Est-ce un avion qui s'est crashé dans notre jardin? Pas loin... Nicolas a laissé tomber la grande échelle lorsqu'il a essayé de la porter pour monter sur je ne sais pas quel arbre, probablement parce que le chat du voisin s'y trouvait. Mais la grande échelle est bien trop lourde pour lui.

Résultat: je vais devoir acheter un cadenas pour fixer l'échelle contre la cabane de jardin, il n'arrivera plus à la décrocher.

Nous faisons un tour en voiture, je m'arrête à dix mètres d'une boîte aux lettres pour envoyer un courrier. Quinze pas pour y aller, quinze pour revenir, je ne coupe donc pas le moteur. Tuuuuuuuuuuuuut! Nicolas s'est détaché de son siège, a filé devant, s'est installé devant et klaxonne. Pire encore, il ferme la porte et ne veut plus me laisser rentrer! Heureusement qu'il n'a pas encore trouvé le bouton qui enclenche le verrouillage central... 

J'ai compris la leçon du jour: Je ne laisserai plus Nicolas tout seul dans le véhicule allumé, même pas une seconde!

Nicolas est donc un casse-coup et un filou. 

Mais il y a aussi du positif: Nicolas découvre des choses, il essaie, il cherche à résoudre les problèmes devant lesquels il est confronté. 

Comme un enfant normal...

Sauf que Nicolas est différent! Et ce pas, c'est un grand pas en avant dans le développement d'un autiste!

Essayons donc de le garder en vie... pas qu'il s'éclate en tombant de l'échelle ou qu'il fasse une accident à 180 sur l'autoroute...


jeudi 17 septembre 2020

120. Des nouvelles de Nicolas

Voici quelques nouvelles de notre petit garçon (qui a grandi!) après notre déménagement. Juste des nouvelles, rien d’exceptionnel, parce que plusieurs personnes en ont demandé.

Nicolas a déjà commencé la quatrième semaine d’école dans le canton de Vaud. Tout n’est pas parfait, mais tout est fait pour que ça se passe bien! 

Si, à Fribourg, nous nous sommes battus contre l’exclusion, la nouvelle école est avant-gardiste pour l’inclusion des enfants différents. Nicolas bénéficie d’un nombre confortable de leçons avec une aide à l’intégration (géniale!) et d’une enseignante spécialisée le vendredi matin. Grâce à la persévérance de mon épouse et un coup de bol, il pourra commencer la logopédie et l’ergothérapie deux après-midis par semaine très bientôt, et ce malgré des listes d’attente.

Toutefois, nous remarquons une grande fatigabilité chez Nicolas. La maîtresse nous dit pareil. Est-ce dû au rythme scolaire plus poussé que ce qu’il avait avant? Est-ce a cause de son traitement de cortisone? Est-ce le déménagement qui l’a épuisé? Y a-t-il trop de changements à la fois pour son cerveau d’autiste?

A mon avis, Nicolas ne dort pas assez. Avant 19h00 déjà, il veut se coucher. Nous le retenons, le stimulons pour qu’il reste debout encore une petite heure. Hélas, bien souvent, il s’endort bien avant 20h00. Vers 5-6 heures du matin, il se réveille et ne veut plus s’endormir. Il veut aller à l’école... laquelle commence à 8h42 précise. Alors, il joue, il court, il se fatigue! Je comprends pourquoi il n’en peut plus le soir!

Ce qui ne facilite pas notre vie, c’est qu’il n’arrive plus à dormir seul. Nous avons relooké sa chambre, réaménagé ses meubles, expulsé ce qu’il y avait à faire disparaître... rien! Si ni ma chérie ni moi nous couchons sur le matelas déposé dans sa chambre, il vient nous chercher avant minuit. Puis, il est agité durant la nuit. Il parle, se tourne, rigole, s’assied puis se recouche. Impossible de se reposer comme ça... ni lui ni nous!

Mais Nicolas va bien, il est heureux, il rigole beaucoup! Il joue à ses jeux bien à lui, il veut découvrir des nouvelles choses - ce qui est assez rare chez un autiste! Il s’ouvre envers nos voisins, va chez eux quand ils lui proposent de voir leur chien, alors qu’avant il ne fallait surtout pas que quelqu’un lui adresse la parole! 

Est-ce vraiment notre Nicolas? Les déménageurs auraient-ils déposé le mauvais garçon chez nous???

Puis je me rappelle qu’il a eu des troubles du sommeil depuis sa naissance déjà. La mélatonine nous a sauvé il y a bientôt quatre ans. Nous lui donnons l’hormone du sommeil tous les soirs car celle-ci n’est pas produite en suffisance chez les autistes.

Nous constatons que ce n’est pas la solution à tous les problèmes :-(

Récapitulation: Nicolas aime le nouveau lieu de vie, il va bien et est fatigué. 

Les parents aiment aussi le nouveau lieu de vie, ils vont bien et sont très fatigués!


mercredi 2 septembre 2020

119. Mémoire vivante

Que s’est-il passé le 14 juillet 1789? La révolution française, prise de la Bastille! Facile!

Et le 16 juillet 1969? L’homme a marché sur la lune, Neil Armstrong (ou Lance... Louis?), Mission Apollo 11.

Ce sont des questions auxquelles je pourrais répondre lors d’un quiz. Non pas parce que j’y étais mais parce que je l’ai appris à l’école. Je saurai aussi vous dire ce qu’il y a eu le 11 septembre 2001 (World Trade Center) ou le 5 novembre 2012 (naissance de Nicolas) parce que je l’ai vécu très intensément. Et aussi la date du mariage et les naissances des autres fils bien sûr!

Au niveau des dates, ça s’arrête là.

Nicolas grandit, il change et avec lui ses centres d’intérêts. Avant, nous avons fait des plannings mensuels à Nicolas pour qu’il puisse se préparer à ce qui l’attend. « Le 17, je vais à l’école. Le 28, je vais au CHUV. »

Depuis quelques mois, Nicolas retient pas seulement ce qui l’attend mais aussi ce qui s’est passé. Et il m’impressionne!

« Le 28 juillet, nous avons été manger une glace à la Coop. » Possible...

« Le 1 août, j’ai pris le train avec papa, nous avons bu un verre à la gare de Moudon. J’ai pris un thé froid. Pêche! »

Je suis installé dans mon bureau au télétravail et raccroche le téléphone. Nicolas entre par la porte. « Le 28, papa a été travailler au bureau à Berne. » Je vérifie mon agenda et le corrige, avec un petit sourire parce que cette fois-ci, il s’est trompé. Le 28 août, j’ai fait du télétravail. Nicolas me reprend, les mains appuyés sur sa hanche: « Mais papa! Je parle du 28 juillet, tu as été travailler à Berne! » je vérifie... Monsieur Je-sais-tout a raison!

Ça marche aussi dans l’autre sens: Nicolas, quand as-tu été piqué la dernière fois par une guêpe? La réponse ne se fait pas attendre: le 3 août! Oui oui; c’est juste.

Dimanche passé, sous la pluie, j’ai emmené Nicolas faire un tour en voiture. On passe devant un bistrot à 20 bornes de chez nous. On s’arrête boire un verre? Nicolas regarde et répond: « Non, ici il y a des mouches » avant de rajouter « Ici, j’ai mangé une glace à la fraise. » Je me répète, Nicolas m’impressionne! Et il me fait pitié, sa tête doit être pleine!!!

Si ça continue, je vais chercher toutes les saisons d’ « Unforgettable » qui doit se trouver au galetas. La femme qui a réussi à résoudre les crimes parce qu’elle se rappelait de chaque petit détail...



mardi 18 août 2020

118. Comme dans une bande dessinée

Il y a Garfield, Obélix, Averell le Dalton ou Grossbouf dans les Schtroumpfs: souvent, dans les bandes dessinées, un personnage a faim en permanence. Cela fait rire les lecteurs dans chaque album.

Chez nous, sans être une famille de bande dessinée, nous vivons aussi avec un affamé depuis bientôt trois semaines. Nicolas a faim en permanence ! Au point ou cela ne me fait plus rire…

Au début, c’était marrant de voir Nicolas demander encore une tartine après avoir dévoré un croissant, quelques biscuits, un chocolat et un yoghourt au petit déjeuner. Il faut préciser qu’il n’a pas encore huit ans et pèse une trentaine de kilos.

Quand, vers 10h30, il demande si c’est bientôt l’heure du dîner, on s’est dit qu’il devait s’ennuyer pendant ses vacances. A onze heure, il a ouvert le frigo pour sortir le tupperware de pâtes qui restait de la veille. Comme nous n’avons pas voulu lui chauffer ceci avant le diner, il a mangé froid.

A midi, il a mangé avec nous... puis une deuxième assiette. Puis un dessert. A 14h30, il voulait manger les quatre heures et, en avalant son snack, il parle déjà du souper... lequel est bien sûr suivi d‘un dessert. c‘est à ce moment qu‘il demande: „Demain on fera des pizzas?“

Je vous entends rire? Pourtant, ce n’est pas un personnage fictif - Nicolas est bien réel!

Est-ce que le déménagement a traumatisé Nicolas pour qu’il mange autant? Je vous rassure que non. Ça n’a rien à avoir avec l’autisme, non plus.

Si Nicolas mange en permanence, c’est un effet secondaire de son nouveau médicament. A cause de sa dernière poussée d’arthrite qui dure depuis avril, le CHUV lui a prescrit de la cortisone, et ce en dose de cheval. 

Un effet secondaire de la cortisone est une prise de poids. Nicolas a pris trois kilos en autant de semaines, donc dix pour cent de son poids de départ. Si ses genoux iront mieux après sa cure de cortisone de 40 jours, ils souffriront du poids corporel par la suite.

Il y a d’autres effets secondaires de ce médicament: les sauts d’humeur, les troubles de sommeil... la totale quoi!

On dirait un adolescent, comme ses frères... et tout ceci en période de déménagement! 

Vous comprenez maintenant pourquoi je n’ai plus donné de signe de vie depuis un mois?




vendredi 17 juillet 2020

117. Déménager avec un autiste

Notre déménagement s'approche à pas de géants. Entre la gestion du « chantier » (il y a quand même 6 corps-métiers sur 2 semaines dans la nouvelle maison), la préparation des cartons dans l’ancien appartement et le travail à 100% cette semaine encore, tout demande beaucoup d‘organisation et encore plus d’énergie! 

La médaille d’or en termes de résistance parvient à ma femme qui, en plus de tout cela, gère Nicolas et le chien! Je ne sais pas dans quelles ressources elle puise... mais elle en a, de l’énergie! Elle trouve probablement cette puissance quelque part en elle parce que nous partons pour un avenir meilleur!

Comment réagit Nicolas à ce changement imminent? Un autiste a besoin de stabilité, d’automatismes, de repères fixes...

La réponse: Nicolas s’en sort très bien pour l’instant! Je suis persuadé que c'est parce que nous l’avons bien préparé.

Dès le début, nous avons parlé ouvertement de la possibilité de déménager cet été, et en avons expliqué les raison positives de ce changement: Nicolas pourra aller dans une nouvelle école qui sera mieux adaptée à lui. 

Ensuite, après avoir choisi la maison, nous ne l’avons pas forcé de sortir de la voiture lors des passages au nouveau domicile. Il a pu rester dans la voiture lorsque nous avons été prendre les mesures etc. C'était comme lors des vacances en Italie: Nicolas a mis du temps avant de pouvoir entrer dans la maison.

Ensuite, maman lui a fait un petit livre avec les photos de la maison, et un autre qui explique ce que c'est un déménagement. C’est devenu la pro de l’illustration! Le calendrier mensuel indique les jours qui restent avant le changement. 

Nous en parlons à table et en jouant, Nicolas à pu poser toutes les questions:
« Est-ce que papa viendra avec nous? » Oui, la famille reste réunie!
« Je peux prendre mes jouets avec moi? » Oui (en espérant que le camion sera assez grand pour tout ça...)
« On aura une télé dans la nouvelle maison? » Oui, même si tu ne la regardes presque jamais.
« Je dormirai avec mon frère? » Non, tu auras une chambre pour toi.

Son expression du visage montre clairement qu’il réfléchit à chaque réponse. Les questions montrent aussi que d’autres enfants ont dû lui parler de déménagements, de changements de dynamique familiale...

Au bout de quelques secondes de réflexion, Nicolas se détend... il sort son grand sourire filou, il commence à faire de l'humour: 
« On laisse le chat à Fribourg! » Mais non!
« Si, il n’y a pas de place pour le chat! »

Le lendemain, ce sont ses frères qui n’ont pas le droit de venir avec nous, le surlendemain le chien puis papa. Le gag reste le même, les personnages changent. Seule maman reste épargnée. Elle est trop importante, on ne rigole pas!

Lors des deux derniers week-ends, nous avons chargé la voiture et déménagé des cartons et petits meubles dans la nouvelle maison. Et là, surprise! Tout à coup, Nicolas était prêt: il est pour la première fois entré dans la maison, il voulait savoir laquelle était sa chambre et a commencé à s’inquiéter: « Mais... il n’y a pas de lit dans ma chambre! »

Explication: son cahier photo montrait les déménageurs qui transportaient une armoire, une chaise, des cartons... mais pas de lit! Nicolas s'imaginait donc que le lit était déjà sur place. C’est comme ça, le fonctionnement d’un petit TSA!

Donc: comment déménager avec un enfant autiste? 

Précisons d'abord que chaque autiste est différent. 
Je répondrai: en étant ouvert avec lui, en lui expliquant, en le rassurant! 

Ce sont d’ailleurs les mêmes réponses que je donnerais à n'importe quel parent d'un enfant neurotypique!

Ils ne sont pas si différents, les autistes...


samedi 4 juillet 2020

116. Rien que des mensonges?

Mensonge 1?

L'école est finie. Le déménagement approche. Dans moins de trois semaines, nous aurons quitté le canton de Fribourg et serons installés dans le canton de Vaud.

Lorsque nous parlons du déménagement à nos collègues ou connaissances, nous leurs expliquons les raisons de ce déménagement: Nicolas pourra aller à l'école publique, il y aura droit à une assistante d'intégration pour les moments difficiles. Ce système d'intégration des enfants différents n'existe pas dans le canton de Fribourg, ce qui veut dire que Nicolas aurait suivi sa scolarité en institution spécialisée. Nous sommes convaincus qu'une scolarité "normale" lui permettra un jour de choisir le métier qu'il aura envie de faire.

Cela vous paraît possible qu'une telle différence de traitement peut avoir lieu d'un canton à l'autre? Beaucoup de gens ne le croient pas. La Suisse est un pays civilisé! Et pourtant, c'est vrai...

Nous sommes donc confrontés à des réactions style "pourquoi vous n'avez pas essayé de discuter avec la direction des écoles?" ou "vous auriez dû intervenir auprès des bonnes personnes..."

Nous avons tout essayé, par tous les canaux imaginables. Nous avons même été en contact avec le conseiller d'état en charge de l'instruction publique, nous en avons parlé à la télé et dans les journaux. Beaucoup de gens ne nous croient pas. Pour eux, nous ne cherchons qu'à faire le buzz.

Vous avez compris? Nous dépensons une somme astronomique en frais de notaire, d'agence immobilière et entreprise de déménagement pour aller habiter dans un village cinq ou dix fois plus petit que le lieu de vie actuel, tout ceci pour déstabiliser nos enfants et doubler le temps de trajet pour aller à mon travail.



Mensonge 2?

Afin de pouvoir transmettre un dossier thérapeutique et scolaire complet aux autorités scolaires vaudoises, nous avons demandé un scan du dossier à Nicolas au Service de l'enseignement spécialisé et des mesures d'aide du canton de Fribourg.

Nous avons régulièrement essayé de communiquer avec ce service qui décide de la scolarisation des enfants différents, mais nous sommes toujours restés devant des portes fermées. Ils argument que tel et tel article de telle et telle loi leur donne la possibilité de ne pas devoir nous parler. Eux, les spécialistes, se basent sur les rapports des thérapeutes et enseignants pour prendre les décisions importantes.

Par contre, la loi sur la transparence nous donne le droit d'avoir accès à nos propres dossiers dans tous les cantons et au niveau de la Confédération. Ils ne peuvent pas refuser cette demande.

A la maison, nous avons toujours soigneusement classé tous les rapports pédagogiques, psychologiques et thérapeutiques de Nicolas. En cinq ans, nombreux ont été les professionnels qui ont été en contact avec notre fils, nous avons rempli un classeur avec ce genre de documents. 

Au bout de quinze jours, le service a répondu par mail. Ma surprise fut grande en ne découvrant que 8 documents qui totalisaient une quinzaine de pages.

Stupéfaction: Leur tableau d'analyse, sur lequel le service se base pour prendre les décisions de (non-)scolarisation de l'enfant, est truffé d'erreurs:

Nicolas vit dans une famille qui parle le portugais, il a un frère hyperactif. Le dernier rapport psychologique date de 2016. Il ne suit ni logo ni ergothérapie. Lorsqu'il est intégré à l'école publique, il bénéficie d'une enseignante spécialisée qui prépare des pictogrammes pour faciliter le déroulement de la journée à Nicolas et la maîtresse. 

En lisant ce rapport, je me pose la question pourquoi nous, les parents, laissons végéter ce gamin. Pourquoi personne n'intervient?

Je réponds donc à l'inspectrice en lui disant que le téléchargement des documents a fonctionné, qu'ils peuvent faire suivre le reste. Je leur indique également que leur tableau d'analyse contient beaucoup d'erreurs et que je cherche à comprendre comment ils peuvent prendre des décisions sur de telles bases erronées.

Une collaboratrice m'a ensuite appelé pour expliquer que ce n'était pas leur rôle de courir après les rapports des thérapeutes. Si c'est écrit que nous sommes portugais, ils ne l'ont pas inventé, ça a dû être écrit quelque part. Ils ont tout fait juste, et ils seraient intervenus rapidement parce que le dernier rapport psychologique date de 4 ans alors qu'il en faudrait un tous les 2 ans.

La dame a même proposé de modifier le tableau et de réanalyser la situation, nous n'avons donc plus besoin de déménager dans un autre canton pour la prochaine rentrée qui a lieu dans sept semaines.



Mensonge 3?

Même si nous savons pertinemment que cela ne changera rien, nous mettrons encore l'énergie nécessaire pour écrire une dernière fois au conseiller d'état en charge de l'instruction publique. Nous avons gardé ses courriers dans lesquels il a fait des promesses. Nous le rendrons attentifs sur le fonctionnement de certains de ses services. Nous lui ferons part notre désillusion totale.

Je parie qu'il ne nous croira pas? La Suisse est un pays civilisé, le canton de Fribourg est avant-gardiste!


vendredi 19 juin 2020

115. Du changement

Il y a du changement dans l'air. Non, je ne parle pas de notre déménagement annoncé dans la dernière publication. Je ne parle pas non plus des progrès que Nicolas a réalisé depuis qu'il va un jour par semaine à la "vraie" école... quoique, le tout est probablement lié.

Il y a du changement chez Nicolas. Il n'est plus le petit garçon dépendant, il est devenu un grand garçon... mais toujours dépendant. Nicolas aura bientôt huit ans. De plus, il est grand pour son âge et on lui donne facilement neuf ou même dix ans. 

Si nous avons reçu beaucoup de méchantes remarques de la part d’adultes ces dernières années (style "votre enfant est mal élevé" ou "pourquoi vous ne faites pas taire votre enfant?"), ces commentaires se font rares. Nicolas est toujours autiste, le commun des mortels réalise que notre fils est différent.

Nicolas fait des choses que d'autres enfants ne font plus à cet âge. Que ce soit l'imitation des bruits entendus dans la rue, les déplacements avec une peluche dans ses mains, la répétition à haute voix des annonces des haut-parleurs dans le bus ou le train ou des cris stridents lorsqu'un bruit inattendu surgit, par exemple une moto ou un coup de claxon, les gens n'ont pas l'habitude de voir un enfant comme ça. Ils ont aujourd'hui la sagesse de ne plus nous faire des remarques car un adulte moyennement intelligent réalise que Nicolas n'est pas comme les autres.

Ceci est donc un changement en bien. Il y a malheuresement le revers de la médaille, ce sont certains autres enfants!

Si, quelques années en arrière, les autres enfants acceptaient qu'un petit garçon crie quand on s'approchait de lui sur une place de jeu, ceci devient plus complexe aujourd'hui. Dès son arrivée au parc, souvent avec son chien guide et maman, les enfants le regardent bizarrement. Un si grand enfant avec une peluche, qui en plus parle fort et agite les bras, qui joue pendant une heure au même jeu, c'est bizarre.

Si Nicolas a un chien d'accompagnement, c'est pour sa sécurité. Si Nicolas se promène avec des peluches, c'est qu'il a besoin d'un point de repère. Si Nicolas réagit massivement aux bruits ou aux odeurs, c'est parce qu'il est hypersensible. S'il répète son jeu tout ce temps, c'est qu'il a besoin de créer et revivre une situation connue. 
Tout c'eci n'est pas écrit sur son front.

Il y a des enfants qui viennent poser des questions, d'autres qui lui proposent de jouer avec lui. Il y en a aussi qui l'ignorent. Ca va bien comme ça.

Et il y a, hélas, ceux qui se moquent ouvertement de lui. Il s'agit là d'enfants qui qui sont en train de devenir grands. Ceux qui veulent forger leur caractère, ceux qui veulent montrer aux autres qu'ils sont meilleurs. Du coup, ce sont des enfants et plus les adultes qui disent des méchancetés.

Nicolas est autiste, il n'est pas bête! Son âge mental correspond au bon âge. Il comprend donc, il réalise que certains autres sont méchants. Ces méchancetés envers lui le rendent triste, il souffre de ce genre de commentaires. Il aimerait être autrement mais il ne l'est pas.

J'ai essayé de dire aux jeunes d'arrêter, de leur expliquer pourquoi Nicolas est comme ça. Il m'est même arrivé d'aller parler aux parents qui clopaient à quelques mètres de là pour qu'ils interviennent auprès de leur enfant, qu'ils lui disent d'arrêter. 

Parfois, en discutant avec les parents, on comprend pourquoi leurs enfants sont cruels! La pomme ne tombe jamais loin du pommier...

mardi 9 juin 2020

114. Je te quitte!

J’en ai assez, j’en ai marre. Marre de toi, de tes manies, de ta façon de (ne pas) communiquer, de tes promesses non tenues, des airs que tu te donnes et que tu n’as pas. Il vaut mieux une fin brutale qu’une brutalité sans fin.

Ça fait quinze ans que nous partageons notre chemin. Il n’y aura pas de seizième année. Dans quelques semaines, j’irai voir un peu plus loin, à 20 bornes d’ici. 

En quittant quelqu'un, on sait ce que l'on perd, on ne sait pas ce que l'on retrouve de l'autre côté. Je n'ai pas d'illusions. La nouvelle sera moins belle que toi, moins attractive. Mais je sais qu’elle sera plus à mon écoute, elle répondra mieux à mes besoins que toi !

Au bout de deux ans déjà, les premiers soucis sont apparus, lors de la scolarisation de notre premier enfant. Nos appels à l'aide sont restés sans réaction de ta part. Suite à notre insistance, des faits ont été détournés et cachés. Avec le recul et l’expérience gagnée, je me dis que ce cas aurait dû être porté devant les tribunaux. Aujourd’hui, c’est trop tard. De toute façon, c’est toujours toi qui gagnes parce que c’est toi qui fais la loi, c’est toi qui qui les interprètes à ta guise.

Les soucis ont continué après la naissance de Nicolas. Je n’ai pas aimé ta passivité, ton manque de soutien dans le quotidien avec cet enfant, et ce depuis sept ans. Pire, tu jettes la faute sur nous, tu nous as menacés. Et là aussi, lorsque nous avons signalé le cas, tout a été caché par tes soins… Aujourd’hui, tu vas même à l’encontre des recommandations du Conseil fédéral ! Tu recules !!!

Tu ne me regretteras pas. Au contraire, tu seras contente de ne plus avoir ce petit récalcitrant qui trop régulièrement te sollicite.

Je te quitte donc, Fribourg. Je parle de la ville, mais surtout du canton de Fribourg. Bien sûr, toute la famille partira avec moi. L’appartement est vendu, notre nouvelle maison nous attend.

Ceci n'est pas un règlement de comptes. Je ne t'en veux pas. Je ne te supporte juste plus, ton attitude hautaine, celle de tes "hauts fonctionnaires". Je m'en veux à moi. Je m'en veux d'avoir attendu tout ce temps avant de franchir le pas.



Bonjour, canton de Vaud. Je sais que tu ne seras pas parfait, mais tu donneras sa chance à Nicolas. Il pourra aller à l’école et y acquérir les bases pour une vie un peu plus normale. Tu mets les moyens en place pour soutenir la cause des autistes. Tu suis la législation fédérale, je dirai même que tu es avant-gardiste.

Si vous avez aussi un enfant avec un trouble du spectre autistique, n’envisagez pas d’aller habiter à Fribourg. Et si vous y êtes déjà… je pense qu’une réflexion de déménager vaudrait la peine.
 

lundi 1 juin 2020

113. Autiste ou coquin?

Nicolas est notre troisième enfant, il a deux frères ados. Nous avons éduqué les deux premiers à notre façon, et je pense que nous avons fait du bon travail.

Nicolas est le petit dernier, il a sept et dix ans de moins que ses frères. En plus il est différent ce qui laisse pas mal de place pour faire des erreur dans l'éducation.

Le fait d'être autiste a certainement donné plus de droits à Nicolas qu'à un autre enfant. Nous en avons souvent parlé avec mon épouse. Jusqu'où est-il autiste, à partir de quand est-il coquin? Chez moi, hélas, le bénéfice du doute prend le dessus, et ce depuis des années. 
"A-t-il bien compris ce que j'ai dit?" 
"C'est certainement trop compliqué pour lui de sortir de ses routines." 
Mais aussi des réflexions style "il a mis cinq ans pour s'ouvrir, il a juste besoin de se rattraper..." ou 
"le pauvre aura assez de difficultés dans sa vie, je le laisse faire maintenant."

De plus, les nombreux commentaires blessants des autres m'ont probablement renforcé dans mon opinion de ne pas suivre les "conseils" de ces gens:
"Ne le laissez pas crier comme ça!" 
"Forcez-le à dire bonjour!" 
"Votre fils est mal élevé voire pourri-gâté!" 

J'avoue, il y a eu un peu de laisser-aller de ma part. Je n'accepterai des critiques à ce propos uniquement de ceux qui ont élevé un enfant autiste.

Ces derniers mois, Nicolas a fait des grand progrès. Le fait d'aller à l'école "normale", d'apprendre à lire et à écrire, mais aussi le fait d'être dix semaines à la maison à cause du confinement ont beaucoup fait murir Nicolas. Je le dis encore une fois: mon épouse fait un travail extraordinaire avec Nicolas! Après le retour à l'école, nous avons reçu plusieurs feedbacks d'enseignants ou thérapeutes qui ont avoué n'avoir presque pas reconnu Nicolas, tellement qu'il a fait un saut en avant.

Le fait de "grandir" a au moins un désavantage pour Nicolas: les parents s'aperçoivent de ses vraies capacités. Et du coup, le bénéfice du doute diminue... et disparaît. Nous analysons autrement le faire-semblant-de-ne-pas-avoir-entendu et les "non". Nous apercevons même des similitudes avec le comportement de ses frères quand ils avaient son âge... ce qui est normal, ce sont (ou ils ont été) des enfants!

C'est normal... mais qu'a-t-il de normal dans l'autisme? Nicolas est différent. J'aimerais bien qu'il y ait plus de normalités, nous l'entraînons donc dans cette optique. Si un jour Nicolas veut suivre un cursus scolaire normal, il faudra qu'il s'habitue à ce qui est "normal". 

Nous le sortons donc régulièrement de sa zone de confort, tout en sachant qu'il y aura une réaction. Souvent, ce sont des cris stridents. Oui, stridents, pas comme ceux d'un enfant "normal".

Si, ces prochains temps, votre verre d'eau vous explose dans la main, votre vitre se brise sans raison ou le fusible de votre appareil auditif lâche, il y a des chances que Nicolas n'était pas loin de chez vous!


samedi 23 mai 2020

112. Le mot le plus long

Un jour, je me retrouverai dans l'émission télévisée (qui sera de nouveau diffusée) "Des chiffres et des lettres". J'aurai marqué quelques points aux calculs car c'est mon dada. Par contre, bien plus de soucis avec le mot le plus long. Je me lancerai avec 19 points de retard dans les deux derniers tours avec des mots à trouver (ils auront passé à dix lettres d'ici-là...).

Consonne: R
Voyelle: E
Consonne: T
Voyelle: E
Consonne: P
Voyelle: O
Consonne: S
Voyelle: E
Consonne: T
Voyelle: Y

Vous avez 40 secondes pour créer le mot le plus long avec ces 10 lettres: R E T E P O S E T Y

C'est bon, 10 lettres et donc 10 points pour moi! Dernier tour:

Consonne: L
Voyelle: I
Consonne: C
Voyelle: E
Consonne: S
Voyelle: O
Consonne: L
Voyelle: A
Consonne: H
Voyelle: E

40 secondes: L I C E S O L A H E

Encore 10 points pour moi, un sprint final avec deux mots à dix points, donc victoire. Merci Nicolas de m'avoir aidé car sans toi je n'aurai jamais trouvé ces deux mots!

Quels mots?

Stéréotype et écholalies

Si, dans le langage commun, le mot stéréotype est utilisé pour "une idée toute faite acceptée sans réflexion", la psychologie utilise le même mot pour décrire "gestes, mouvements ou paroles répétés de façon mécanique, sans participation de la volonté, et inadaptés à la situation."

C'est un comportement qui décrit bien Nicolas. Depuis tout petit déjà, il a eu besoin de routines pour être bien. En grandissant, il se créé ses routines. L'engrenage tourne.

Exemples:
- Tous les matins en se levant, Nicolas regarde 3 Pepa Pig à la télé, et ce depuis des années. Au bout de 3 épisodes, il éteint l'écran, il s'habille et est prêt pour entamer la journée. Il ne regarde plus la télé jusqu'au lendemain.
- Sur le trampoline, quand Nicolas ne saute pas, il court toujours dans le sens des aiguilles d'une montre. J'ai essayé à de multiples reprises de changer le sens, sans succès.
- Dans la journée, Nicolas a droit à des moments de tablette "libres", p.ex. après le dîner ou avant d'aller au lit. Quand il regarde des vidéos sur Youtube, ce sont toujours les mêmes clips. Il regarde des films avec des ascenseurs ou des ventriloques français. Toujours les mêmes clips, toujours les mêmes extraits. Il regarde aussi des vidéos avec des histoires et des comptines que ses maîtresses lui ont envoyé pendant le confinement.

A la moindre déstabilisation, un grain de sable se met dans les rouages. Cela ne tourne plus rond. Nicolas amplifie les routines et il entre dans ses stéréotypes. Cela peuvent être 
- des paroles: il crie "je ne sais pas, je ne sais pas!"
- des mouvements, une sorte de grimasse, comme s'il bâillait tout en levant les yeux au ciel, 
- ou ses comportements: Tout à coup, Nicolas doit se mettre en pyjama pour se rassurer. Il va dans sa chambre et prend sa tablette pour regarder ses vidéos d'ascenseurs.

En cette période de changements - confinement, déconfinement, école à temps partiel, papa en télétravail, etc. - il y a eu beaucoup de moments où Nicolas a dû se réfugier dans son monde. C'est toujours la même chose. 


Echolalies: "Répétition automatique, par un sujet, des paroles que vient de prononcer son interlocuteur".

C'est tout Nicolas... aussi! C'est surtout (mais pas uniquement) durant ses phases de crises qu'il commence à parler. Il ne répète pas ce que nous venons de dire, il répète ce qu'il a vu dans ces vidéos. C'est joli à le voir répéter les histoires et comptines des maîtresses, avec l'intonation. 

Mais il reproduit aussi les sketches des ventriloques, il répète les paroles des vidéos des ascenseurs. Style "1er étage. Sous-sol. Parking." Et comme il y a beaucoup de vidéos d'ascenseurs du Japon ou de Stockholm, Nicolas commence a répéter ces mots en japonais et en suédois, avec l'intonation!

Là aussi, c'est totalement inadapté à la situation. On le laisse faire pour qu'il se rassure, pour qu'il garde ses marques. 

Mais les gens nous regardent bizarrement dans la rue si Nicolas commence à répéter un sketch de Capucine dans la rue, en disant à haute voix "Salut les petits zizis!"

Avec Nicolas, la vie est stéréotypée mais pas monotone!