samedi 29 avril 2017

13. Que dire...?

Un collègue vous dit que son enfant a été diagnostiqué autiste? Une maman devant vous à la caisse au supermarché s'excuse du comportement de son enfant autiste? Un proche vous confie que son fils est Asperger? 

Dans la surprise, vous ne savez pas comment réagir... c'est normal! Dites leur Merci de s'être ouvert à vous. Souhaitez leur du courage. Ou ne dites rien. 

Mais évitez de faire l'une des remarques suivantes (que j'ai toutes entendues !)

1. Vous êtes sûrs ? Il est tellement beau, on ne dirait pas qu’il est malade !
Oui, même s'il n'est pas dans un fauteuil roulant, il est quand même autiste.

2. Toutes mes condoléances !
Pourquoi donc ? Il n’est pas mort ! Au contraire, il est bien plus vivant que les autres !
3. C'est tout ce que vous trouvez comme excuse ? Votre enfant est mal élevé, c’est tout !  
Parce que vous êtes très poli(e) pour dire des choses pareilles !
4. Oh, je connais bien l'autisme ! Le frère du facteur de la cousine d’un collègue de travail a aussi un fils asperger.
Vous avez l'air très impliqué. Un vrai expert ! Probablement que vous pouvez aussi entraîner une équipe de foot parce que vous avez regardé un match à la télé.
5. L’autisme, je n’y crois pas. C’est encore une de ces inventions des psychologues quand ils ne trouvent rien d’autre pour expliquer un problème.
Contrairement à la stupidité des gens qui est facilement détectable mais on ne dit rien par souci d'être détestable.

6. Le fils d'une copine est aussi Asperger. Il a 30 ans et va très bien.
Merci, c'est rassurant. Cette copine a dû vivre des choses difficiles (tout comme son fils). Je parie qu'il a été à l'uni et qu'il est au chômage depuis 5 ans...

7. Je connais bien l’autisme, j’ai vu Rain Man.
Oh-oh! Même si le film est très bien fait et explique beaucoup des choses, il faut préciser qu’il date de 1988 et que bien des progrès ont été faits depuis. N'oublions pas que chaque cas est différent! Raymond (interprété par Dustin Hofmann) avait environ 50 ans dans le film et il parlait. Nicolas en a 4 et ne prononce aucun mot.
8. Ah ! Les enfants ! Toujours des soucis ! Ma fille a le rhume depuis une semaine et mon fils a glissé sur le trottoir en janvier...
Pauvres gamins... avoir une maman si égocentrique doit être difficile !

9. Je ne veux même pas savoir ce que ceci doit impliquer pour toi ! Parce que cela ne m’intéresse pas… 
Au moins, ça a le mérite d’être clair ! Dommage que ça vienne d’un proche… ou plutôt d'un ex-proche.

10. Nous avons tous nos problèmes.
C'est juste. Je ne te parlerai plus des miens, mais il ne faut plus espérer trouver une oreille chez moi non plus !

En tous les cas, je peux vous rassurer : Vous ne devez pas avoir peur. L'autisme n'est pas contagieux! Contrairement à la bêtise humaine qui, elle, l'est!

vendredi 14 avril 2017

12. Histoires d'oeufs

C'est bientôt la fête des œufs. Des œufs de poules peints, des bonbons en forme d'œufs, des chocolats en forme d'œufs, du chocolat en forme de coquilles d'œufs remplies avec des chocolats... bref : c'est Pâques !

Nicolas adore les œufs ! Non pas pour manger mais pour jouer. Disons plutôt qu'il adore les objets en forme d'œufs. Si vous voulez lui faire plaisir, offrez-lui un œuf "Kinder". En deux temps trois mouvements il aura enlevé l'emballage en papier alu, tranché le chocolat en deux pour s'emparer de la boîte ovale jaune qui contient un jouet. Ce dernier finira rapidement à la poubelle, tout comme le papier alu. Le chocolat finira dans mon estomac avant la fin de la journée... L'objet des tous ses désirs restera la boite jaune.

Il y cache ses trucs : une figurine Mickey, un porte-clés ou quelques Smarties. Tout fier, il promène le tout dans l’appartement puis change le contenu de l’œuf. Donald prend la place à Mickey, un lego au lieu du porte-clés, les Smarties dans la bouche. Et hop ! le prochain tour d’appartement. Comme Kinder fait également des grands œufs avec des boites jaunes d’un diamètre d’une bonne vingtaine de centimètres, je dois me sacrifier et manger plus de chocolat pour que Nicolas puisse mettre une peluche en boite. Mais où est donc passé la télécommande ? Quelqu’un a vu mon portable ? Nom d’un œuf…

Nicolas possède aussi d’autres œufs système poupées russes (un œuf emboite l’autre). Si personne ne l’interrompt, il peut passer des longs moments à jouer avec ces objets. Des longs moments où papa et maman peuvent le laisser plus ou moins sans trop de surveillance et où l'on peut cuisiner ou nettoyer sans avoir Nicolas dans nos jambes.

Par contre, il peine à distinguer ses œufs jouets avec les vrais œufs. A table, il ne supporte pas quand nous cassons la coquille d’un œuf cuit. Je pense qu’il souhaiterait garder la coquille entière pour y cacher d’autres figurines. Ses cris sont si stridents que nous avons commencé à ne plus manger d'œufs entiers et privilégié les œufs brouillés ou au plat.

Une fois, Nicolas a même réussi à choper un œuf cru à la cuisine. Ce qui devait arriver arriva : un œuf brisé par terre, un Nicolas inconsolable parce que son « jouet » est parti en mille morceaux. Devinez qui a nettoyé la cuisine… non, ce n'était pas Nicolas !

Comme la vache en Inde, l'œuf est devenu sacré chez nous. Personne n'osait plus toucher les œufs. Sa collection de boites jaunes a atteint une bonne quinzaine (en fait, il y en aurait eu bien plus si personne ne les avait enlevé pendant la nuit). Nicolas y cachait ses jouets... des vrais trésors!

Ce jeu est devenu une habitude, l’habitude une routine, la routine un stéréotype. Jusqu’au jour en août 2016 où nous avons appris en thérapie intensive familiale FIAS qu’il fallait briser les stéréotypes. Les étouffer dès qu’ils se créent. Nous avons appris que les autistes créent souvent des stéréotypes pour se rassurer parce qu’ils font la même chose. Nous avons aussi appris qu’il fallait les sortir de leur zone de confort pour qu’ils progressent. En même temps, nous sortons aussi de notre zone de confort (nous en avons une avec un enfant comme Nicolas?) et nous aussi on progresse!

De retour de la thérapie, nous avons enlevé tous ces œufs à Nicolas. Il ne les a jamais réclamés. Comment pourrait-il ? Il est aphone !

Dans deux jours, ce sera le retour des œufs à la maison. Je suis curieux de voir comment Nicolas va réagir ! Si jamais il ne supporte pas les œufs en chocolat, je me sacrifierais pour les manger…

Je vous souhaite de joyeuses Pâques !



vendredi 7 avril 2017

11. Yaourt au thon

Avez-vous déjà goûté les yaourts au thon? Vous aimez les cannellonis au nutella? Le tout complété avec une bonne cuiller de mayonnaise? Je vous rassure: c'est dégueulasse! Non, il ne s'agit pas d'un nouveau plat concocté par Philippe Etchebest, ce n'est pas non plus une nouvelle ligne alimentaire de Nestlé. C'est du Nicolas!

Nicolas, quand il aime, il mange. On a beau lui dresser son assiette à compartiments avec ce qui serait bon pour lui (vitamines, protéines, calcium etcétéra). Quand il voit que quelqu'un a autre chose dans l'assiette qui est susceptible d'être bon, Nicolas veut déguster.

Nous aussi on déguste. A force de voir ses mélanges, ça nous coupe l'appétit. 

Comme nous sommes des parents qui ne gaspillent pas la nourriture, et comme nos grands ont eu passablement d'allergies alimentaires puis encore plus de rejets imaginaires (donc psychologiques) d'aliments sains ou verts, notre table est toujours bien remplie. En général, nous cuisinons tous les jours (Francine est un cordon bleu, moi aussi j'adore cuisiner), nous avons toujours des plats frais sur la table. De plus, nous y trouvons des féculants datant de quelques jours, quelques légumes d'hier, des restes de la grillade de midi, et bien sûr comme chaque bon Valaisan un frigo rempli de fromages et viande séchée (fait maison). Puis il y a bien sûr des sauces: dans la casserole, dans des pots et dans des tubes. Heureusement que notre table est grande, heureusement que Francine a amené une grande collection de tupperware dans le ménage 15 ans en arrière (elle a dû me cacher d'être membre "platine" chez eux...). 

Les grands visionnent ce qu'il y a dans la casserole et le four pour se créer leur menu au "buffet" de restes, le tout réchauffé aux micro-ondes. Souvent, c'est pates-fromage pour l'un et pates-viande pour l'autre, accompagné d'une sorte de légumes imposée. Maman et papa mangent en fonction de la péremption des surplus d'aliments. Oui, nous sommes trop gentils, mais c'est une habitude qui s'est créée avec le temps. Et les deux grands ne sont ni trop maigres ni trop gros et en bonne santé physique, donc on laisse passer.


Nicolas quant à lui reçoit son assiette à compartiments remplie de nourriture fraîchement cuisinée. Hmmm! Tu parles... il fait le tour de table et nous montre ce qu'il veut en plus - ce qu'il y a dans les assiettes des autres. Nous complétons son assiette, il déguste chaque compartiment... avant d'affiner le tout à sa façon. Un pot de sauce tomate? Sur les petits pois. Il rajoute de la mayonnaise un peu partout (c'est sa phase mayo depuis quelques semaines), du pesto sur le poulet coupé en petits cubes. Si par malheur il y a du Nutella sur la table... et oui... Miam! En général, il vide son assiette, non sans se lever 25 fois et tourner autour de la table! Une "experte" nous a suggéré de l'attacher sur sa chaise, on n'y est pas encore.

Une fois l'assiette vidée, c'est l'heure du dessert! Un petit yaourt framboise qu'il cherche lui-même dans le frigo. Oh! il reste du thon! Un nouveau mélange! Est-ce si étrange? Les asiatiques mettent bien des oignons et des ananas dans leur riz!

Nous avons essayé de le structurer, d'interdire... en vain. Ses poumons à 120 décibels sont plus forts que nos nerfs! Et bien évidemment, nous sommes contents parce que Nicolas, lui, il mange. Il commence même à avoir un petit bidon... Au moins, sa phase "je ne touche pas d'aliments humides" est terminée, finie aussi la période de ne manger que des trucs colorés et ronds (principalement petits poids et smarties)!

Pour ma part, je me réjouis de regarder en 2035 la 28e saison de Top Chef sur M6 avec la participation du jeune cuisinier Nicolas lequel, par sa vision révolutionnaire de mélanger les ingrédients, laissera les grands chefs bouches bées. Il arrivera en finale! La production par contre devra diffuser (encore) plus de publicité pour remplir le créneau horaire - le grand Nicolas ne donnera pas d'interviews! Ça restera son secret où il va chercher son inspiration!


dimanche 2 avril 2017

10. Le 2 avril, un jour si exceptionnel?

Aujourd'hui, c'est le 2 avril, la journée mondiale de sensibilité à l'autisme. Elle vise à mieux informer le grand public sur les réalités de ce trouble du développement. Le bleu étant la couleur de l'autisme, on l'appelle aussi la journée bleue. Si vous étiez attentive (attentif) à ceci, vous aurez certainement lu ces derniers jours dans un journal, vu à la télé ou sur un site internet que le 2 avril, c'était justement la journée mondiale de l'autisme...

Pour aider à rendre la population attentive sur ce trouble (et sur les produits qu'ils vendent), différentes entreprises lancent des actions marketing le 2 avril. Europapark par exemple, le plus grand parc d'attractions de l'Europe, a accueilli plus de 500 autistes et accompagnants pour leur permettre de découvrir le parc sans devoir faire les files d'attente et en leur proposant trois (3!) pièces dans le parc où ils pouvaient se retirer au besoin, étant donné que beaucoup d'autistes ne supportent pas la foule.

Chez nous, je n'ai pas vu beaucoup d'actions de ce genre. L'association Autisme Fribourg a organisé une sortie au musée de l'histoire naturelle cet après-midi. Nous sommes tous arrivés au musée habillés en bleu. Hélas, comme il faisait assez froid, le musée était bondé de familles avec des petits enfants. Difficile de s'y promener avec des autistes! Les visiteurs du musée par contre, eux, n'ont pas dû être au courant que c'était la journée de l'autisme parce que les regards méprisants envers nos enfants lorsqu'ils criaient, et surtout envers nous les parents, étaient les mêmes que d'habitude.

De mon côté, j'ai quand même vu une différence ce 2 avril. J'ai enfin pu mettre mon Homer Simpson en bleu sur mon profil Facebook. Ca faisait quand même 1 mois que j'attendais ce moment :-) 

Mon employeur a mis un article sur l'autisme sur le site intranet vendredi déjà. Aurions-nous des autistes qui travaillent chez nous? Le même jour, probablement suite à cet article, plusieurs collègues de travail sont venus me parler de l'autisme et ont posé des questions sur Nicolas. Ce matin, j'ai reçu quelques SMS de personnes qui pensaient à moi parce que c'était la journée bleue. Ma soeur m'a envoyé une photo d'elle et ses filles habillées en bleu - même le chat a eu droit à un ruban bleu. Merci pour tous vos messages encourageants! La campagne marketing a dû faire mouche...

Demain, ce sera le 3 avril. Plus personne ne parlera d'autisme. La télé montrera des émissions sur d'autres sujets, les journaux rempliront leurs pages autrement. Nos soucis avec Nicolas resteront les mêmes. Les gens penseront moins à nous. Moins de SMS, moins de mots encourageants. Bref, un jour normal, un retour aux habitudes. Il faudra patienter 364 jours jusqu'à la prochaine journée bleue.

Mon combat restera le même. Je vous sensibiliserai sur mon quotidien durant toute l'année - à condition que vous me restez fidèles! Merci à vous!




PS: Mon dernier blog a eu 260 vues. C'est public, je n'ai rien à cacher. Vous pouvez bien sûr partager ou faire suivre. A mon avis, plus il y aura de personnes qui me lisent, plus grandes seront les chances qu'un jour quelque chose changera!


NB: Nous avons reçu une lettre du directeur de l'AI Fribourg vendredi. Il promet qu'il va investiguer ce qui s'est passé... Affaire à suivre!