Il y a une année
et demie, j'ai répertorié ce qui se
passe dans la vie quand vous êtes papa d'un autiste. En relisant mes propos
d'antan, je constate que j'ai réussi à prendre du recul depuis... mais je
n'effacerai aucun des points mentionnés de cette liste.
Depuis, Nicolas a développé
une maladie auto-immune, une arthrite juvénile idiopathique. Un à deux enfants sur mille sont touchés par cette maladie. Je vous
laisse imaginer que cela complique encore le quotidien déjà assez compliqué. Rien qu'en pensant au nombre
de contrôles médicaux, qui ont lieu à une heure de route de chez nous et ne sont pas évidents parce qu’il faut déchiffrer les réactions
d’un autiste qui ne répond pas forcément aux questions du médecin.
J'ai donc refait une liste
de ce qui se passe en tant que père d'un enfant autiste atteint d'une arthrite
juvénile:
1. Comme tout le monde
connaît quelqu'un atteint d'une arthrose, vous expliquez régulièrement la différence entre arthrose et arthrite aux gens.
En fait, l'arthrose
est un problème plutôt mécanique, une faiblesse du cartillage entourant
l'articulation dû à l'usure (p.ex. vieillissement, surcharge), alors que l'arthrite
est une inflammation de la membrane autour des articulations dû à une infection
ou - dans le cas de Nicolas - une maladie auto-immune. L'organisme produit des
liquides appelés quinines qui le détruisent et qui peuvent atteindre d'autres
organes.
2. Quand l’enfant joue avec
les Playmobile, d'autres figurines ou ses peluches, ceux-ci ont toujours mal
quelque part. Leur activité principale consiste d'aller chez le docteur ou à
l'hôpital.
3. Quand l'enfant vous
appelle pendant qu'il joue, il vous appelle Docteur papa ou infirmière maman.
4. Dès que l’enfant marche
un peu bizarrement, même s’il imite quelqu’un dans son jeu, vous l’observez
pendant des heures pour voir si sa démarche est redevenue normale ou si ça
pourrait être une nouvelle poussée d'arthrite.
5. Quand l'enfant
(hyperactif par son autisme) se pose dix minutes, vous vous posez directement
la question s'il a mal ou s'il est juste fatigué parce qu'il a couru pendant
une heure.
6. Si l’enfant tombe sur
ses genoux ou arrive à se retenir avec ses mains, vous vous imaginez tout de
suite que l’articulation en question a lâché. Vous observez le moindre de ses
mouvements durant le reste de la journée.
7. Quand vous vous rendez
au CHUV (Centre hospitalier Universitaire Vaudois) pour un contrôle, vous
ignorez les indications du GPS parce que vous savez mieux comment éviter le trafic, et bien sûr vous connaissez mieux les raccourcis
que cet appareil.
8. Vous pensez
régulièrement qu'il faudrait habiter plus près d'un bon hôpital afin
d'économiser du temps de trajet en cas d'urgence...
9. Vous pensez
régulièrement qu'il aurait fallu faire des études en étant jeune et choisir un
autre métier, comme p.ex. médecin ou pharmacien...
10. En parlant pharmacie :
Vous entrez dans la pharmacie et tout le personnel vous connaît. Tous les employés
qui passent vous saluent par votre nom.
11. Même catégorie : Vous
cherchez un sac en plastic dans l’armoire de cuisine, et vous sortez forcément
un sac de la pharmacie.
12. L’assurance-maladie
vous appelle et vous propose de changer de modèle de soins pour vous faire
économiser des primes (tout en sachant que c’est l’assurance qui économisera en
prestations...)
13. Vous expliquez et réexpliquez
les contraintes d’une vie avec une arthrite aux collaborateurs de
l’assurance-invalidité en vous rappelant que ce sont les mêmes personnes qui,
quelques années en arrière, ont dit qu’un enfant autiste ne demande pas plus de
travail qu’un enfant normal.
14. Votre collègue se
plaint parce que son fils a déclenché une otite ou sa fille a le mal de mer, et
vous n'arrivez pas à avoir de la compassion pour eux.
15. Vous remerciez le ciel
d'avoir un enfant comme Nicolas à chaque fois que vous voyez un enfant bien
plus malade que le vôtre!
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